En plein mouvement social, les réformes continuent

Voilà maintenant la loi Pacte, catalogue de mesures en faveur de l’entreprise et du capital.

Dominique Plihon  • 20 février 2019 abonné·es
En plein mouvement social, les réformes continuent
photo : Le projet de loi Pacte prévoit de privatiser Engie, Aéroports de Paris et la Française des jeux, secteurs où la régulation publique est essentielle.
© RAMIL SITDIKOV / SPUTNIK

On a eu la loi travail, les mesures fiscales en faveur du capital (ISF, flat tax) et la loi sur le secret des affaires. Voici maintenant la loi Pacte (Plan d’action pour la croissance et la transformation de l’entreprise) – en cours de discussion au Parlement –, nouvelle pièce de l’édifice macronien dont l’objectif est de « mettre l’entreprise au centre de la société ». Catalogue de mesures en faveur de l’entreprise et du capital, la loi Pacte vise en priorité le développement des PME, deux fois moins nombreuses en France qu’en Allemagne. L’objectif est de « libérer les entreprises » en réduisant les « contraintes » réglementaires et juridiques pesant sur elles. C’est la même philosophie ultralibérale que celle qui sous-tend la loi travail, fondée sur l’idée que le droit du travail et le droit social sont des obstacles au développement de l’entreprise et de l’emploi. C’est ainsi que les seuils sociaux seront relevés pour alléger certaines obligations des PME, notamment celles de promulguer un règlement intérieur, de disposer d’un local de restauration ou encore de contribuer au financement du logement des salariés.

Pour faire bonne figure, la loi Pacte propose d’augmenter le nombre d’administrateurs salariés, qui resteront très minoritaires dans les conseils d’administration, et d’élargir « l’objet social » de l’entreprise en modifiant l’article 1833 du code civil, qui disposera que les entreprises devront prendre en considération « les enjeux sociaux et environnementaux ». Mais il s’agit là d’une mesure purement cosmétique, car aucune obligation juridique nouvelle, susceptible d’une action contentieuse, ne pèsera sur elles !

Une des dimensions les plus inquiétantes de la loi Pacte concerne la réduction du champ de l’intervention publique. Le projet de loi prévoit de privatiser Aéroports de Paris, Engie et la Française des jeux, secteurs où la régulation publique est essentielle concernant les questions d’aménagement du territoire, de transition énergétique et de moralité publique. Elle banalise en outre le statut et la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour la faire entrer dans le régime commun des banques. Cette réforme aura une portée considérable au moment où le gouvernement a décidé de créer un « pôle public financier » contrôlé par la CDC, résultant d’une fusion de celle-ci avec la Banque postale et CNP, premier assureur français. La logique financière du nouveau groupe, dont le bilan s’élèvera à 1 000 milliards d’euros, sera dominée par la recherche de rendement à court terme. Ce qui ne manquera pas de remettre en cause les missions de service public de la Banque postale, dernière banque publique de proximité, et de la CDC. Cette dernière gère une grande partie de l’épargne populaire, ce qui en fait le principal investisseur dans les domaines du logement, des transports et des infrastructures, secteurs clés de la transition écologique et sociale.

Alerte ! L’État macronien poursuit ses réformes néolibérales, tout en faisant diversion par l’orchestration du « grand débat »…

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