« L’Humanité » : sursis et soulagement

Le tribunal de commerce de Bobigny a choisi l’option du plan de continuation pour le quotidien historique, plutôt que sa liquidation.

Jean-Claude Renard  • 7 février 2019
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« L’Humanité » : sursis et soulagement
© photo : ALAIN PITTON / NURPHOTO

Ouf de soulagement pour les quelque deux cents salariés du journal. En cessation de paiements, L’Huma avait été placé vendredi 25 janvier sous la protection du tribunal. Avec deux options : prononcer la liquidation du journal ou bien accepter le plan de continuation proposé par la direction. Le tribunal de commerce a donc choisi le sursis espéré, avec un plan de redressement judiciaire qui lui permet de poursuivre son exploitation. Dans le cadre de cette procédure de redressement, qui s’accompagne d’une période d’observation de six mois, le tribunal a désigné deux administrateurs judiciaires, et une nouvelle audience est prévue le 27 mars. Le tribunal a notamment nommé une spécialiste du sauvetage d’entreprises, Hélène Bourbouloux (Presstalis, FagorBrandt, Vivarte, SoLocal…).

En attendant la décision du tribunal, le journal a lancé une nouvelle souscription, laquelle a déjà rapporté plus d’un million d’euros. L’Huma a besoin de trois millions d’euros au moins. Une campagne d’abonnements devrait être lancée prochainement pour relancer les ventes, (– 6,24 % sur un an), atteignant à peine les 33 000 exemplaires, cependant que les recettes publicitaires ont aussi fortement chuté.

Le directeur de L’Huma, Patrick Le Hyaric, ne fait pas de la situation financière du titre une seule question comptable : « C’est une question politique de premier ordre qui interroge une société soucieuse de l’expression du pluralisme des idées, de la démocratie. Au moment où tant de débats et d’inquiétudes s’expriment sur les “fabriques” de “fausses nouvelles”, laisser mourir L’Humanité reviendrait à affaiblir la presse de qualité et à assécher encore plus le débat contradictoire. Au moment où les médias connaissent une telle crise de confiance, l’engagement constant de L’Humanité aux côtés des travailleurs, des milieux populaires, des “invisibles”, des penseurs qui contestent le système, des créateurs qui portent haut la culture constitue un atout pour le journalisme et un atout pour l’exercice de la citoyenneté. »

C’est aussi, estime Patrick Le Hyaric, « un enjeu de souveraineté pour le pays au moment où plusieurs journaux nationaux viennent ces derniers temps d’être rachetés ou recapitalisés par des groupes industriels et financiers étrangers qui lorgnent sur des activités productives de la France ». Si le journal cherche de nouveaux actionnaires, du côté de l’économie solidaire par exemple, alors que son capital est majoritairement détenu par la société des Amis de L’Humanité, tout en se plaçant « sous protection populaire et citoyenne », Le Hyaric pointe ainsi l’indépendance de la presse à l’heure des concentrations toujours plus resserrées. Une soirée de soutien est programmée le 22 février à Montreuil, à la halle Marcel-Dufriche, en présence de plusieurs personnalités.

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