Le gloubi-boulga des européennes

À la clôture du dépôt des listes, le 3 mai, le ministère de l’Intérieur en a recensé pas moins de 33.

Agathe Mercante  • 8 mai 2019 abonné·es
Le gloubi-boulga des européennes
© crédit photo : KENZO TRIBOUILLARD/AFP

Voici venu le temps des élections européennes. Après un automne, un hiver et un printemps marqués par les mobilisations des gilets jaunes, les marches pour le climat et le « grand débat » – qui n’avait de débat que le nom – l’heure est à la campagne et au vote. À la clôture du dépôt des listes, le 3 mai, le ministère de l’Intérieur en a recensé pas moins de 33. Deux listes estampillées gilets jaunes (l’Alliance jaune de Francis Lalanne, Évolution citoyenne de Christophe Chalençon), une du Mouvement pour l’initiative citoyenne, qui défend le RIC, une du Parti pirate, une autre prônant l’usage de l’espéranto ou encore une du Parti animaliste viennent ainsi s’ajouter aux très (trop ?) nombreuses candidatures déjà déclarées – les téléspectateurs du débat du 4 avril sur France 2, où 12 candidats tentaient d’expliquer leur programme dans la cacophonie générale, s’en souviennent.

Déjà en campagne, les listes principales captent la lumière… et les intentions de vote. Le Rassemblement national récolterait, selon les sondages, 23 % des voix, talonné par Renaissance, la liste menée par la macroniste Nathalie Loiseau, à 21,5 %, suivie par Les Républicains, à 15 %, Europe Écologie-Les Verts (9 %) et La France insoumise (8,5 %) (1). En dilettante, la liste Place publique-PS-Nouvelle Donne oscille autour des 5 % de voix nécessaires pour avoir des représentants au Parlement européen. Voilà pour les éligibles. Quelques candidats, pourtant crédités de peu, parviennent à se faire une place au soleil médiatique : Benoît Hamon (2,5 %) et le communiste Ian Brossat (3 %). La gauche, plus morcelée que jamais, présente des programmes comportant quelques similitudes, allant d’une critique unanime des traités libéraux à un meilleur accueil des migrants en passant par l’urgence écologique. À droite et à l’extrême droite, se croisent et s’entrecroisent les alliés d’antan : Florian Philippot (Les Patriotes), Jordan Bardella (RN) ou encore Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) font cavaliers seuls tandis que François-Xavier Bellamy (LR) tente d’incarner la droite traditionnelle qui avait séduit les électeurs de François Fillon (les magouilles en moins).

Cette abondance de listes et de candidatures rappelle à qui voudrait l’oublier que la recomposition politique post-élection de Macron est loin d’être terminée. La supernova libérale, incarnée par la liste Renaissance, continue, deux ans après, d’agréger autour d’elle toutes les mouvances, des écologistes Pascal Canfin et Pascal Durand passés sous pavillon macronien à quelques brebis d’extrême droite tentées par le discours anti-immigration de Nathalie Loiseau (n’avait-elle pas fait le distinguo entre migrants et réfugiés ?) couplé à sa présence, il y a fort longtemps certes, sur la liste d’un syndicat d’extrême droite. Autant d’éléments qui rappellent qu’en France, pays peu joyeux des enfants à majorité malheureux, les monstres politiques et pas si gentils sont aussi de sortie.


(1) Sondage Euro-Rolling 2019 de l’Ifop, 7 mai 2019.

Politique
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