The Kinks, (presque) rois du rock

Notre Voyage autour de nos chambres #46 vous invite à regarder The Kinks, trouble-fêtes du rock anglais, excellent documentaire consacré à un groupe majeur, emblématique du Swingin’ London.

Jérôme Provençal  • 9 mai 2020
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The Kinks, (presque) rois du rock
© The Kinks Creu0301dits Pictorial Press Ltd - Alamy Banque D’Images.jpg

Tout autant que leurs grands rivaux (The Rolling Stones, The Beatles, The Who), The Kinks auraient pu devenir les rois de la pop et du rock dans les années 1960. Leur nom même semblait d’ailleurs les prédestiner à cette consécration – à une lettre près : Kinks au lieu de Kings, tordus/bizarres au lieu de rois.

Distorsion fatale

Oui, dès le début et à jamais, il y a quelque chose de (dis)tordu au royaume des Kinks. Cette distorsion saute ainsi fabuleusement aux oreilles sur You Really Got Me, leur tube originel, sorti en 1964 et devenu un hymne éternel grâce avant tout à son infernal riff de guitare.

Cette distorsion s’entend aussi dans les paroles souvent mordantes de Ray Davies, songwriter d’élite portant un regard volontiers caustique sur l’Angleterre et sur son époque. En témoignent par exemple des chansons telles que Dandy, Well Respected Man ou Dedicated Follower of Fashion. Un sentiment aigu de distorsion (voire de distanciation) sociale se perçoit par ailleurs dans I’m Not Like Everybody Else, l’une des plus belles chansons du groupe.

Mené par Ray Davies (chant, guitare, harmonica), et son frère Dave (guitare), le quatuor londonien va faire feu de tout bois durant ses premières années d’existence, entre rock nerveux gorgé de rythm’n’blues et pop orchestrale sophistiquée – avec l’album The Kinks Are TheVillage Green Preservation Society (1968) en guise d’apothéose céleste.

Outsiders éternels

A partir de 1970, le groupe va nettement perdre de son lustre, naviguant de concept-albums plus ou moins opératiques en pop-rock calibré pour la FM américaine – même si la plume de Ray Davies garde (presque) toujours une certaine élégance. Leur dernier album (Phobia) date de 1993. S’il est encore parfois question d’une reformation, on aimerait a priori autant qu’elle ne se concrétise pas…

Trop différents, trop classieux pour le voisinage, trop incontrôlables (en raison notamment des rapports conflictuels entre les deux frères Davies), ces outsiders éternels font aujourd’hui l’objet d’un documentaire captivant, The Kinks, trouble-fêtes du rock anglais – disponible sur arte.tv du 9 mai au 10 novembre 2020 (diffusé le 15 mai à 22h25). L’auteur en est Christophe Conte, ancien pilier des Inrocks, qui alterne désormais entre presse écrite (Libé, Vanity Fair…) et télévision.

Irréductible éclat

Dense et dynamique, riche de nombreuses images d’archives (shows télé, extraits d’interviews, clips, photos…), le documentaire traduit très bien la passion érudite de Christophe Conte pour son sujet et recueille en outre les témoignages de plusieurs autres amateurs éclairés, dont Michka Assayas, Bertrand Burgalat et Jon Savage.

Se focalisant avant tout sur l’âge d’or du groupe et la persistance de son aura, il en restitue parfaitement l’irréductible éclat. Une place centrale est évidemment réservée à Waterloo Sunset, somptueuse ballade d’une irradiante beauté crépusculaire.

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Musique
Temps de lecture : 3 minutes
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