Une messe pour le traité?

Michel Soudais  • 24 octobre 2007
Partager :

On savait déjà que le nouveau traité européen, qui n’est ni-mini, ni simplifié (je sais je radote, mais il y en a qui s’obstinent encore à nous faire croire qu’Harry Potter est un livre de poche), serait officiellement signé le 13 décembre, à Lisbonne. Restait encore à savoir dans quel palais ou édifice public.

C’est José Manuel Barroso qui s’est chargé de vendre la mèche. Malheureusement, l’annonce faite à l’Europe du président (portugais) de la Commission a fait un flop. Au moins en France. Aucune trace dans les journaux. Un oubli regrettable. Car c’est dans un monastère que les Vingt-Sept donneront l’onction au traité remplaçant la défunte Constitution.

Le monastère Dos Jeronimos, un fleuron de l’architecture manuélienne inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1983, ne manque pas d’attraits touristiques. C’est aussi déjà dans ce monastère des bords du Tage que «le traité d’adhésion du Portugal à la Communauté européenne a été signé» le 12 juin 1985, a rappelé M. Barroso pour expliquer que ce choix était «particulièrement significatif» .

Il est surtout symbolique d’un traité dont le premier article modifie le préambule du traité de l’Union européenne pour y ajouter une référence à «l’héritage religieux» de l’Europe[^2]. Un point très contesté dans le défunt traité constitutionnel, qui est donc repris tel quel. On comprend que nos grands médias aient préféré taire le lieu où sera célébrée la messe de leur cher traité.

Qu’on s’entende bien. Il n’est pas question de nier le rôle important joué par les religions dans l’histoire politique et culturelle du continent. Mais dans un préambule censé définir ce qui fonde l’adhésion des peuples d’Europe à une identité commune et célébrer l’unité d’un continent ravagé des siècles durant par des guerres souvent menées au nom d’une foi intolérante, ont eu préféré y lire une référence explicite aux grands textes émancipateurs (la Magna Carta, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, etc.) et une distinction claire du spirituel et du temporel.

[^2]: «S’INSPIRANT des héritages culturels, religieux et humanistes de l’Europe, à partir desquels se sont développées les valeurs universelles que constituent les droits inviolables et inaliénables de la personne humaine, ainsi que la liberté, la démocratie, l’égalité et l’État de droit;»

Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don