Le FN et l’extrême droite,
retour vers le passé

Marine Le Pen conteste l’étiquette accolée à son parti avec les mêmes arguments qu’avançait Jean-Marie Le Pen. Depuis 1984, c’est la même chanson.

Michel Soudais  • 4 octobre 2013
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Illustration - Le FN et l’extrême droite,<br> retour vers le passé


Les polémiques autour du Front national ne se renouvellent guère. Et le journaliste que je suis éprouve quelque lassitude à devoir se répéter.
Certes, formellement, la petite entreprise de la famille Le Pen procède de temps à autres à de menus « rafraichissements », comme on dit dans l’immobilier quand on refait les peintures. Mais les fondations, l’orientation de la boutique, le découpage des pièces et même la disposition du mobilier, demeurent.
Pourquoi ce préambule ? Parce que le refus de Marine Le Pen de voir son parti être étiqueté d’extrême droite et ses menaces de poursuivre en justice ceux qui s’obstineraient à le qualifier ainsi n’ont rien de nouveau. Je l’ai rappelé brièvement hier.

Lire > Twitter se gausse de la blague de Marine Le Pen

Dans Le Front national en face (Flammarion, 1996), j’y avais consacré quelques pages[^2]. que je reproduis volontiers ci-dessous. C’est un peu plus long que ce à quoi nos lectures nous ont habitué depuis la généralisation d’internet.
Mais il ne semble pas inutile, à l’heure où certains sont tentés d’offrir au mouvement créé par Jean-Marie Le Pen (qui en reste le président d’honneur) un certificat de virginité [^3], de rappeler que le FN, à plusieurs périodes de son histoire, a cherché à se débarrasser de cette étiquette.
Au moins depuis 1984.
Et avec quatre arguments similaires à ceux avancés ces derniers jours par Marine Le Pen.
Voici donc:

Illustration - Le FN et l’extrême droite,<br> retour vers le passé

Jean-Marie Le Pen et son parti ne sont pas d’extrême droite. Ce scoop, car cela en serait un si l’information était vérifiée, le président du Front national a cherché à l’imposer à la presse durant l’automne 1995. Par lettre recommandée avec accusé de réception. « Il ne m’appartiens certes pas de dire à un organe de presse quelle présentation il doit donner du mouvement que je préside , écrivit-il à plusieurs directeurs de journaux. Mais j’ai le droit, vous en conviendrez sans doute, de contester celle qu’il adopte si elle est manifestement erronée et tendancieuse. Je tiens donc à vous informer qu’à l’avenir je compte exercer ce droit en vous réclamant chaque fois que les mots « extrême droite » et « extrémiste » qualifieront le Front national dans vos colonnes, la publication d’un « droit de réponse » au titre de la loi du 29 juillet 1881 – article 13. » Le ton est courtois, comme il sied dans une correspondance administrative, mais le contenu de la missive n’en est pas moins menaçant.

Le droit de réponse permet à toute personne nommée ou désignée dans un journal ou un périodique, les livres et les tracts étant exclus de son champ d’application, d’exiger l’insertion d’une réponse à l’article, même si elle y est présentée sous un jour favorable. Gratuite, cette insertion doit alors être faite à la même place et dans les mêmes caractères que l’article qui l’a suscitée. Elle peut avoir les mêmes dimensions, avec un minimum de 50 lignes et un maximum de 200. Le directeur de la publication est tenu d’insérer les réponses dans les trois jours suivant leur réception par la voie d’une lettre recommandée qui lui est adressée, ou, à défaut, dans le plus prochain numéro, sous peine d’une amende et sans préjudice des autres peines et de dommages-intérêts. Les personnes physiques comme les personnes morales (associations, sociétés, collectivités…) peuvent se prévaloir de ce droit de réponse. Elles disposent pour cela d’un délai d’un an et sont seules juges de l’opportunité, de la forme et de la teneur de leur texte, ce qui peut ouvrir la voie à toutes sortes d’abus, même si, en pratique, ils sont rares. Toutefois, le texte de la réponse doit avoir un caractère pertinent par rapport à la mise en cause et ne pas comporter de termes contraires aux lois, aux bonnes moeurs, à l’intérêt légitime des tiers ou à l’honneur du journaliste.

Ainsi consacré par le code pénal, le droit de réponse est certes « un droit général et absolu » , selon une jurisprudence constante de la cour de cassation, mais son usage répétitif pour contester systématiquement ce qui relève avant tout de la libre appréciation du journaliste et de son support, constituerait au mieux une intimidation, au pire une censure. Ce que semble attester le choix des destinataires, puisqu’au moins les quatre grands quotidiens nationaux, Le Figaro , Le Monde , Libération et Le Parisien , ont reçu alors la même lettre. A un détail près : les uns se voyaient reprocher de désigner « couramment » le Front national comme un parti d’extrême droite, les autres « de façon constante » . La réplique n’a guère tardé. Dans son édition du 15 novembre 1995, le Canard enchaîné ironisait sur la prétention de Jean-Marie Le Pen affichée dans sa lettre, deux semaines seulement après son envoi : « Ni à droite, ni à l’extrême, mais ou est donc passé Le Pen ? » De son côté, Le Monde portait le débat sur la place publique en publiant l’intégralité de sa lettre assortie de la réponse de son médiateur, André Laurens, sous le titre « Droit de réponse et stratégie de rétorsion » [^4]. A sa façon, Le Parisien avait déjà répliqué en démontrant comment le discours tenu par le président du Front national à Carpentras le 11 novembre renouait avec « le discours traditionnel de l’extrême droite » [^5]. Dans la préface qu’il venait de donner à un livre écrit par des journalistes de National-hebdo sur « l’affaire Carpentras » , il qualifiait d’ailleurs Laurent Fabius d’un méprisant « parlementaire d’origine juive » [^6], alors que celui-ci était président de l’Assemblée nationale au moment des faits reprochés, et qu’en outre il n’a jamais porté son ascendance en bandoulière. Après cette mini levée de boucliers, Jean-Marie Le Pen, jugeant sans doute qu’il était plus prudent d’attendre, avait préféré ne pas mettre à exécution sa menace de demander « chaque fois » que son mouvement serait qualifié d’« extrême droite ».

La polémique est réapparue en juin dernier après l’ordonnance de référé de la cour d’appel de Versailles imposant au quotidien Le Monde (9-10 juin 1996) la publication d’un droit de réponse de Jean-Marie Le Pen contestant une chronique de Pierre Georges du 12 mai 1995 consacrée au meurtre de Brahim Bouaraam, ce jeune marocain noyé dans la Seine le 1er mai 1995, en marge du défilé du Front national. L’ancien candidat de ce parti à l’élection présidentielle y soutenait notamment que « le FN n’a jamais eu de discours xénophobe (…) *, n’est pas un parti raciste »* et que son discours « a justement pour objectif d’éviter la généralisation d’affrontement sur notre sol entre personnes d’origines différentes » . Contestant que son parti soit « raciste, xénophobe ou fasciste » , M. Le Pen affirmait : « Il n’est ni de droite ni de gauche. De tels critères apparaîtront comme totalement désuets. Il est le parti de la France. » Commentant à la fois ce texte et la décision de justice qui l’imposait, Jean-Marie Colombani estimait dans un éditorial que l’obligation de « publier un plaidoyer irréel de M. Le Pen est une atteinte à la liberté de la presse » . « Si ce jugement est confirmé , avertissait le directeur du quotidien du soir, toute expression d’une opinion sur le Front national devra être suivie d’une mise au point du parti d’extrême droite au nom du refus d’ ‘ une expression unilatérale ’ et du respect du ‘ caractère contradictoire d’une information ’ . » Le 11 juin, c’était au tour de Libération d’être astreint à publier deux droits de réponse, l’un du Club de l’horloge, l’autre du quotidien Présent , tous deux contestant le qualificatif d’ « extrême droite ». La 14e chambre civile de la Cour d’appel de Versailles a finalement infirmé, le 3 juillet, le jugement condamnant Le Monde à publier la réplique litigieuse de Jean-Marie Le Pen. Les magistrats versaillais ont déclaré « mal fondé le Front National dans sa demande d’insertion » , et l’ont condamné à verser au journal du soir « une somme globale de 30.000 F pour frais hors dépens » . Ce parti s’étant immédiatement pourvu en cassation, le débat n’est pas clos.

Une question d’image

« Qu’on le veuille ou non, l’extrême droite sent le souffre » , estimait déjà Jean-Marie Le Pen dans Les Français d’abord , son livre programme publié en 1984. Au passage, il n’hésitait pas à comparer cette étiquette à une « étoile jaune » accolée par ses adversaires, « un signe d’infamie, un repère pour la chasse aux sorcières » . Depuis cette date, qui coïncide avec son émergence politique, le président du Front national n’a jamais cessé de contester ce qualificatif, arguant de motifs divers, voire contradictoires, qu’il n’est pas inutile de rappeler.

Premier type d’argument : « En science politique, [l’extrême droite] a une définition bien précise » , affirme-t-il dans sa lettre du 31 octobre 1995, envoyée à plusieurs quotidiens. Celle-ci évoquerait « les ligues et les mouvements fascistes d’avant guerre » , et se caractériserait par « le refus de la démocratie et des élections, l’appel à la violence, le racisme et la volonté d’installer le parti unique » . « Or sur chacun de ces points , écrit Jean-Marie Le Pen, le Front national se distingue de l’extrême droite et même s’oppose à elle. » Manque de chance, l’extrême droite n’a pas du tout de définition précise en science politique, même si un Lexique de politique , publié chez Dalloz en 1992 et cité par Jean-Marie Le Pen prétend en donner une. Au contraire, ceux-ci préfèrent plutôt parler des extrêmes droites[^7]. Les politologues ne sont pas plus « nombreux » à corroborer cet analyse assez restrictive de l’extrême droite[^8]. Quant aux jugements d’autorité convoqués par le leader national-frontiste, ils sont pour le moins abusifs : Ainsi quand, fin 1995, Le Pen entend citer René Rémond à l’appui de son propos, le fait-il en exhumant un texte paru Le Monde , le 16 avril… 1985. Le président de la Fondation nationale des sciences politiques y notait que le Front national « se garde de mettre en question les institutions et le suffrage universel. C’est, concluait-il, ce qui interdit de l’identifier à la tradition contre-révolutionnaire comme à l’agitation ligueuse de l’entre-deux-guerres. » Cinq ans plus tard, l’évolution du parti frontiste avec des appels à la « discipline » et aux « consignes » , font dire à René Rémond[^9] que « le Front national devient une force organisée. C’était jusqu’à présent une différence avec les ligues d’avant-guerre, qui étaient puissamment encadrées.  » « Les thèmes traditionnels de l’antiparlementarisme de l’extrême droite » , se retrouvent aussi, selon lui, dans « la dénonciation de la classe politique, de l’ ‘ establishment ’ *, de la corruption »* . Six ans après, René Rémond précise encore sa pensée sur le Front national dans le Nouvel observateur du 20 juin 1996 : « Il n’est pas nécessaire pour être à l’extrême droite aujourd’hui de reproduire les comportements des années 30. On peut donner acte à Jean-Marie Le Pen de ce qu’il accepte le cadre des institutions et qu’il ne remet pas en cause la souveraineté populaire et le suffrage universel. Mais cela ne suffit pas pour récuser l’appellation d’extrême droite. » Le moins que l’on puisse dire c’est que depuis 1985 ce bien involontaire témoin de moralité a fait faux bond. 

Deuxième argument employé, parfois concurremment avec le précédent, bien que les deux soient contradictoires : « L’extrême droite est une notion floue, imprécise, équivoque, d’usage plus polémique que scientifique , affirme Jean-Marie Le PenJ[^10]. On s’en sert comme d’une arme dans un combat où les mots tuent parfois plus sûrement que des balles. (…) Le concept d’extrême droite est si vague, aussi bien dans l’espace que dans le temps, que le Grand Larousse encyclopédique ne s’est même pas risqué à en donner une définition. Indéfini, il se prête donc admirablement à tous les amalgames historiques ou idéologiques. » Cette assertion n’est pas sans fondement. Pierre-André Taguieff, que le président du Front national n’oublie pas de citer à l’occasion[^11], ne s’est d’ailleurs pas privé de l’écrire. Pour ce chercheur au CNRS, qui voit dans « l’extrême droite » des « lieux aussi indésirables que mal définis » et préfère l’appellation générique de « droites radicales » , le pluriel renvoyant à une pluralité de formes et de doctrines, il ne s’agit que d’une « dénonciation démonisante » , une « labellisation figée » empruntée à « la démonologie de propagande de tradition antifasciste » , en aucun cas explicative. Bien au contraire, en retombant dans des schémas préétablis, elle ferait l’im­passe sur la connaissance du phénomène, à commencer par sa dimension idéologique[^12]. Assez curieusement, la formule est aussi d’un usage récent, alors que la plupart des groupements que l’on qualifie communément d’extrême droite revendiquent tous à des degrés divers un héritage historique remontant parfois jusqu’à l’Ancien Régime. « Les publications officielles ne comptabilisent les résultats électoraux de l’extrême droite qu’à partir de 1956 » , notait René Chiroux dans sa thèse[^13]. Les statistiques électorales du Ministère de l’intérieur pour les élections législatives de 1951 comprenaient ainsi « une rubrique «listes diverses modérées» incluant en particulier les candidats de l’UNIR (Union nationale et indépendante républicaine), mouvement rassemblant des personnalités éligibles favorables au Maréchal Pétain *, et animé par Me Jacques Isorni * » . En ne s’imposant qu’avec le succès du poujadisme, la notion d’extrême droite est bien apparu dans un contexte polémique. Cela ne signifie pas pour autant qu’elle soit « indéfinie ». Après s’être interrogé sur les points communs aux divers groupuscules rangés sous cette appellation, René Chiroux en concluait que « l’extrême droite se situe toujours négativement par rapport aux problèmes posés. Elle est, pour reprendre une expression classique, la « droite du refus » : refus des grandes mutations modernes économiques, sociales, morales, institutionnelles ; refus du gaullisme ; refus de l’institutionnalisation de la société internationale ; refus de la décolonisation. » Vingt-deux ans après, le gaullisme n’est plus que l’ombre de lui-même et la décolonisation n’est plus d’actualité, mais les différents points communs gardent leur pertinence.

Troisième argument du leader du FN : « La sémantique n’est pas neutre, puisque l’adjectif d’extrême gauche est : gauchiste, et que l’adjectif d’extrême droite : est extrémiste de droite, ce qui laisse entendre qu’elle mettrait au service d’idées extrémistes ou révolutionnaires des méthodes extrémistes ou terroristes » [^14], fait observer Le Pen en répétant inlassablement que son parti n’est « extrémistes ni dans ses idées ni dans ses méthodes » . Pour le FN, l’enjeu est d’importance. « Les luttes politiques sont des luttes sémantiques , expliquait ainsi Bruno Gollnisch dans une tribune libre publiée dans le Figaro [^15]. Celui qui impose à l’autre son vocabulaire lui impose ses valeurs, sa dialectique et l’amène sur son terrain, à livrer un combat inégal. » Le secrétaire général du parti lepéniste le sait d’autant plus que son mouvement invitait dès 1989 ses militants à engager « la bataille du vocabulaire » .

Quatrième argument : Dans le monde médiatique, souligne encore Jean-Marie Le Pen, l’extrême droite est toujours associée à la violence. « Quand il y a un attentat, un incendie, un meurtre, des violences, on dit: « On ne néglige pas la piste d’extrême droite », et on associe toujours ce mot à ces images. Après, il suffit de l’associer systématiquement au Front national pour obtenir une espèce d’image subliminale » , une « image politiquement connotée » . Comme il le dit lui-même, en s’adressant d’abord à ses partisans, peu importe « que cette réputation soit justifiée ou non, on est obligé de tenir compte de la représentation que s’en fait le public » , car « en politique, n’existe que ce qui paraît exister » [^16]. Or le leader du Front national ne cache pas son intention de donner de son parti une image présentable. « Dans un pays où, naguère personne, à part le Front national, n’acceptait de se dire de droite, tant le mot paraissait chargé négativement, on comprend que celui d’extrême droite ne puisse attirer que les romantiques amoureux des causes perdues et du camp des maudits, ou les masochistes. » Ceux-ci seront donc invités à aller militer ailleurs. Mais les habitudes sont tenaces. Treize ans après avoir écrit ces lignes,  Jean-Marie Le Pen était encore obligé de faire la leçon aux jeunes militants du Renouveau étudiant réunis en congrès à Fontenay-le-Marmion, près de Caen, le 1er octobre 1995 : « Même si l’on a de l’indulgence pour les activités folkloriques de la jeunesse » , devait-il déclarer devant un parterre de congressistes issus pour partie des rangs du GUD, il faut que « les activités de folklore politique soient écartées de nos modes d’action. (…) Certains croient malin de lever le bras, parce que quand on lève le bras on attire irrésistiblement les caméras de télévision. Et puis ça permet de se prendre pour un dur. Tout cela doit être écarté. Et les gens qui ne comprennent pas que ce genre de démonstration puérile est infiniment nuisible à la cause qu’ils servent sont en fait les complices et les serviteurs de leurs adversaires. S’il y a des gens chez nous qui veulent se faire plaisir, qu’ils aillent se faire plaisir ailleurs. Après tout on n’est pas obligé de venir troubler la fête des Bleu-Blanc-Rouge. Quand on a du cran ou du poil aux pattes, on va faire ça à la fête de Lutte ouvrière ou à celle de l’Humanité! (…) Je peux avoir pour la jeunesse beaucoup d’indulgence. Jamais quand la cause et son succès sont menacés. » La vraie raison du rejet de la notion d’extrême droite par le Front national est donc avant tout tactique. Quand la cause et son succès sont menacés…

Aller plus loin:
Lire > Le FN rattrapé par des histoires d’Occupation
Lire > « Jihad du sexe » : qui s’est fait baiser ?
Lire > Aux sources du 1er-Mai du Front national: Georges Valois


[^2]: Pages 147 à 156

[^3]: C’est le cas de Guillaume Tabard du Figaro (lien payant) qui, ne renonçant à aucune provocation, la voit en patronne du… Front de gauche.

[^4]: Le Monde , 19-20 novembre 1995.

[^5]: Le Parisien , 13 novembre 1995 [Alors pigiste au service politique de ce quotidien, j’avais en charge le suivi du FN] . Citations élogieuses de Charles Maurras, référence à l’anti-France, dénonciation implicite du lobby juif… le discours de Jean-Marie Le Pen avait ce jour-là un air de déjà vu.

[^6]: Jean Roberto, Marie-Claire Roy, Martin Peltier, L’Affaire Carpentras. Analyse d’une manipulation d’Etat , Éditions National-hebdo, 1995, p. 7. Jean-Marie Le Pen, qui revient dans la préface sur le « psychodrame » qui a suivi la profanation du cimetière juif de Carpentras, y écrit aussi que « la harpe de David a tenu plus que sa part dans le lancinant concert de la désinformation ignominieuse » .

[^7]: « Il n’y a pas une extrême droite mais des extrême droites » , écrit ainsi Ariane Chebel d’Appollonia dans L’extrême droite en France de Maurras à Le Pen , Complexe, 1988, p. 10.

[^8]: Ils sont plutôt souvent d’avis de classer le FN à l’extrême droite. Même si certains sont d’un avis contraire. C’est notamment le cas d’un certain Christophe Boutin, auteur d’un article dans la Revue française d’histoire des idées politiques du 1er semestre 1996, intitulé « L’Extrême droite française au-delà du nationalisme, 1958-1996 » . Ce maître de conférence de droit public à l’université de Bourgogne ne fait pas mention dans son étude du « national-populisme du Front national » au triple motif que : 1. Il « accepte théoriquement de jouer un jeu démocratique qu’il ne remet pas en cause, dans son discours officiel au moins » . 2. Même « si l’on y retrouve (…) d’anciens membres des groupuscules d’extrême droite » , ceux-ci ne représentent qu’ « une partie » des militants frontistes. 3. « La participation même du Front national au jeu démocratique, en permettant à ce personnel d’accéder à des postes d’élus locaux, voire d’élus nationaux ou européens, contribue à le ‘notabiliser’. » Avec un tel raisonnement, même un authentique parti fasciste cesserait de l’être en accédant légalement au pouvoir. Vingt-cinq siècle après Socrate, la sophistique n’a pas disparu de l’université.

[^9]: Libération , 11mai 1990.

[^10]: ean-Marie Le Pen, Les Français d’abord , Éditions Carrere-Michel Lafon, 1984, p. 180. Douze ans après leur publication, ces pages sont toujours « pertinentes » , a estimé Bruno Gollnisch lors d’une conférence de presse le 13 juin 1996.

[^11]: Dénonçant, dans sa lettre du 31 octobre 1995, « une forme peu honorable du combat politique, celle qui s’abstient de discuter les idées et se contente de les classer dans des catégories préétablies » , Jean Marie Le Pen s’appuie sur Pierre-André Taguieff *, « pourtant peu suspect de sympathie à mon égard »* , pour s’en prendre au quotidien Le Monde  : « Il faut reconnaître au journal Le Monde un rôle de leader dans l’approche extrême droitière du Front national (…). Les dossiers réalisés par Alain Rollat   ont donné le ton de l’interprétation dominante » , écrivait le chercheur, cité par Le Pen.

[^12]: Cf. Pierre-André Taguieff, ‘La doctrine du national-populisme en France’ in Études , janvier 1986, pp. 27-46; repris et complété dans Le Front national à découvert , Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1989, chap. 10.

[^13]: René Chiroux, L’extrême droite en France sous la Vè République , LGDJ, 1974, p.12 et sq. Cette thèse aujourd’hui complètement dépassée reste susceptible d’intéresser les curieux, ne serait-ce que pour le panorama très complet que l’auteur y dressait des multiples courants de l’extrême droite.

[^14]: Op. cit. p. 180.

[^15]: Le Figaro , 21 juin 1996.

[^16]: Op. cit. p. 179.

{Photo: Michel Soudais}
Temps de lecture : 20 minutes
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