De l’esprit de parti…

… et de ce qui pourrait en coûter.

Bernard Langlois  • 30 août 2015
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Ils étaient deux jeunes députés, élus de Provence, amis et alliés par le mariage de l’un avec la sœur de l’autre. Républicains convaincus, révolutionnaires fringants, et qui avaient voté la mort du roi sans frémir.

Jean-François Ducos et Jean-Baptiste Boyer-Fonfrède siégeaient à la Convention. Ils étaient de jeunes espoirs du parti de la Gironde, promis à de belles carrières si la lame de la guillotine ne les avaient écourtées : les carrières, et eux-mêmes, avec toute la chefferie girondine. Nous sommes en 1793, au commencement de la Grande Terreur.

Illustration - De l'esprit de parti…


Je pensais, en lisant le récit de leur chute et de leur mort [^2], à ces jeunes (ou moins jeunes) du PS qui ne cessent de fustiger leur parti, ses dirigeants et l’exécutif qui en est issu. Mais qui, au bord du Rubicon les séparant d’une gauche un peu plus présentable, sont incapables de faire mieux que d’y pêcher à la ligne.

Lamartine écrit ainsi que « Ducos et Fonfrède n’avaient partagé, à la Convention, ni la sagesse de Condorcet et Brissot, ni la modération de Vergniaud [^3] .Enthousiastes et fougueux comme la Montagne, ils avaient gourmandé souvent la mollesse révolutionnaire de leur parti. (…) Le geste et la parole de Danton les entraînaient. Il eût été leur chef si Vergniaud n’avaient pas existé. »

En quelque sorte, mutatis mutandis , on pourrait dire d’eux qu’ils étaient à l’époque tout à la fois les « Frondeurs » et le MJS de ce lamentable parti solférinien qui vient de donner à La Rochelle sa représentation annuelle.

Ils espéraient donc sauver leurs têtes, comme nos contestataires d’aujourd’hui pensent pouvoir (les mœurs étant moins brutales, ce sont les électeurs qui tranchent, pas la lame de la Veuve) conserver écharpes et mandats.

« Ils espéraient en secret que les Montagnards leur tiendraient compte au dernier moment de leurs opinions. Ils n’étaient coupables que de porter le nom de leur parti » , conclut joliment Lamartine.

C’est parfois bien coupable, et dangereux, de rester attaché à un clan qui a renié tous ses engagements.

[^2]: Histoire des Girondins, p.1566/67, Alphonse de Lamartine, préface de Mona Ozouf, Bouquins, Robert Laffont, 2498 p., 60 €.

[^3]: Trois des plus éminents représentants et chefs de la Gironde.

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