Biodiversité: une loi de façade dénaturée pour les chasseurs et la FNSEA

Comme la protection de la nature n’intéresse plus ni les politiques ni l’opinion publique, les parlementaires ont laissé transformer le texte en déclaration de bonnes intentions dissimulant un renoncement

Claude-Marie Vadrot  • 24 juillet 2016
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Annoncée et présentée il y a quatre ans par le gouvernement, la loi sur la Biodiversité, ou ce qu’il en subsiste, vient enfin d’être adoptée définitivement. Pas de quoi réjouir les protecteurs de la nature et ce qui reste d’espèces protégées. Quant aux écologistes dits politiques ils ont d’autres chats à fouetter, plus passionnés par leurs déficits que par la nature. Celui de leurs caisses qui sont vides pour cause de chamailleries internes et aussi celui qui devient béant dans leur crédibilité auprès de l’opinion publique.

La loi n’est guère qu’une déclaration de bonnes intentions qui dissimulent habilement les mauvaises. Elle n’est pas non plus à la hauteur de la loi de 1976 sur la protection de la nature qu’elle prétend remplacer ou compléter. D’autant plus que si le texte des années 70 avait été voté à l’unanimité moins une voix, celui péniblement remanié et contesté par les groupes de pression, n’a pas eu le don d’inciter la droite à l’approuver. Ce qui amènera le parti des Républicains, s’il revient au pouvoir, à le détricoter. Histoire de ne pas faire mentir Nicolas Sarkozy affirmant un jour de visite du salon de l’Agriculture, « l’écologie ça suffit ». Si l’extrême droite s’impose, le résultat sera le même. Il suffit de consulter les décisions des conseils régionaux et des conseils départementaux de droite pour se rendre compte qu’ils privent peu à peu les associations de protection de la nature de leurs subventions. Comme l’a fait, par exemple, le président « à l’extrême droite toute », de la Région Auvergne Rhône-Alpes, Laurent Wauquier, qui vient de supprimer une grande partie de la contribution au budget de la FRAPNA, la Fédération Régionale de France-Nature-Environnement ; sous le prétexte qu’il ne veut pas aider le mouvement associatif à faire de « l’opposition systématique ». Avec ses amis politiques et l’appui de la gauche, il participe au démantèlement des objectifs des parcs nationaux que tous, ou presque, veulent transformer en luna-parks touristiques. Tout comme ils le font avec les parcs naturels régionaux qu’ils multiplient parce qu’ils n’imposent aucune réglementation.

Comme beaucoup d’autres, à droite mais aussi à gauche, ce représentant lyonnais de la droite extrême qui brigue la désignation par son parti aux prochaines primaires pour la présidentielle, confond la protection de la nature sous toutes ses formes avec un choix entre la droite ou la gauche. Comme si les ours, les loups et tous les oiseaux et mammifères protégés par la loi de 1976 allaient s’inscrire sur les listes électorales pour les scrutins du printemps 2016. Il y a longtemps qu’ils sont les victimes des enjeux électoraux… La preuve : le parti des Républicains vient de contester officiellement la nouvelle loi devant le Conseil constitutionnel avec l’appui officiel de la FNSEA.

La biodiversité française se meurt, la biodiversité française est menacée de simplification et d’extinction parce que personne ne veut remettre en cause le groupe de pression des chasseurs et celui des agriculteurs de la FNSEA. Les uns et les autres, indifférents aux dégradations, craignent que soient mis fin à leurs privilèges et à leurs pouvoirs politiques. Ce sont d’ailleurs eux qui ont patiemment œuvré pour édulcorer la loi. En faisant pression auprès des parlementaires, au Sénat et à l’Assemblée nationale, des élus qui font semblant de croire que ces électeurs minoritaires dans le corps électoral sont nécessaires à leur réélection. Et quand ils évoquent la nature c’est pour décorer leurs massifs, leurs jardinières et leurs rond-point ornés de plantes banales pour gagner une mention dans l’éternel concours des « villages fleuris ».

D’ailleurs, les chasseurs (à peine 1,2 millions), y compris ceux qui élèvent des sangliers, des faisans ou des perdrix pour les relâcher devant des « tireurs » plus ou moins avinés ne sont pas concernés par la loi puisque l’Office national de la chasse et de (sic) la faune sauvage, a échappé à la loi et ne sera pas concerné par L’office sur la biodiversité dont la création est prévue pour le premier janvier prochain. Un organisme qui ne verra probablement pas le jour.

En fait la biodiversité et sa sauvegarde ne sont pour beaucoup d’élus qu’un objet de discours et de postures parce que tout le monde s’en fout…

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