Urgence écologique contre Europe libérale

L’essentiel du droit environnemental des pays de l’Union s’élabore à l’échelon européen. Mais il ne fait l’objet d’aucune concertation à haut niveau. Face à l’urgence écologique, l’Europe peine à se libérer de ses dogmes libéraux.

Patrick Piro  • 28 mai 2009
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Urgence écologique contre Europe libérale

On l’ignore généralement, mais plus de 80 % du droit de l’environnement des pays membres s’élabore à l’échelon européen ! Il existe donc de fait une « norme » dans l’Union pour la qualité de l’air et des eaux, le recyclage des déchets, les émissions de gaz à effet de serre, etc. C’est compréhensible : les grands dossiers environnementaux sont « naturellement » transfrontaliers, et cette élaboration communautaire a projeté l’Europe en première ligne sur la plupart des sujets environnementaux lors de la mandature qui s’achève (2004-2009), alors que la crise écologique a pris l’ampleur que l’on sait.

Mais on ne saurait qualifier de « politique » une harmonisation qui ne fait pas l’objet d’une concertation à haut niveau (comme la politique agricole commune) : il s’agit de dossiers traités un à un, et souvent en compétition, voire en opposition avec de puissantes forteresses de l’Union
– agriculture, commerce et concurrence, industrie, etc. Deux innovations importantes sont bien représentatives de ces frictions : le règlement Reach, qui instaure un contrôle sur les matières chimiques mises en circulation, mais sous une forme très édulcorée ; et le paquet Énergie-Climat pour lutter contre le dérèglement climatique, dont l’ambition pionnière a été fortement rabattue. Dans les deux cas, le décalage entre l’urgence écologique grandissante et la modestie récurrente des engagements communautaires est emblématique d’une sourde bataille qui prend de l’ampleur : entre le besoin de réglementation qu’impose la protection des ressources naturelles, et les dogmes fondateurs des institutions européennes, profondément libéraux.

La nouvelle législature européenne (2009-2014) pourra difficilement s’accommoder du statu quo, alors que la crise climatique, notamment, viendra exacerber ces contradictions. Pour autant, ce débat de fond n’est toujours pas posé au sein des grandes formations politiques qui garderont la mainmise au Parlement, puis à la Commission, après le vote du 7 juin.

Écologie
Temps de lecture : 2 minutes
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