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Le gouvernement ignore la situation des Tunisiens arrivés en France après la chute de Ben Ali. Les interpellations se poursuivent.

Erwan Manac'h  • 26 mai 2011 abonné·es

Plusieurs semaines après le cri d’alarme lancé mi-avril par des associations, la situation reste bloquée pour les centaines de migrants tunisiens arrivés à Paris via l’île italienne de Lampedusa, à la suite de la destitution de Ben Ali.
Les interpellations se poursuivent, tout comme les renvois vers l’Italie, qui a délivré 6 000 titres de circulation dans l’espace Schengen. D’après le décompte du ministère de l’Intérieur, 3 200 personnes ont été expédiées de l’autre côté des Alpes depuis fin février. Celles qui sont interpellées avec leur passeport sont renvoyées directement en Tunisie, mais les autres sont relâchées pour vice de forme ou avec une obligation de quitter le territoire sans effet.

Dans le même temps, la situation sanitaire et sociale demeure critique pour les migrants, malgré l’aide d’urgence délivrée par la Mairie de Paris fin avril. « Pour ceux qui sont dans la rue, la situation est difficile, il y a une épidémie de gale qui commence, malgré les permanences de Médecins du monde et le travail des associations » , explique Gilles Lemaire, de l’association FTCR (Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives). Dans la capitale, un gymnase du Xe arrondissement est occupé depuis le 8 mai, avec le soutien de la Coordination des intermittents et précaires, qui avait déjà accompagné des réfugiés tunisiens dans un premier squat, évacué le 4 mai. La Mairie de Paris les a sommés de quitter les lieux avant le 26 mai à midi, arguant d’une « grave ­détérioration des ­conditions d’occupation du gymnase » .

Les associations d’accueil des sans-domicile et des migrants, déjà débordées avant la crise actuelle, ont d’énormes difficultés à réagir efficacement, alors que le manque de places était déjà criant dans les centres d’hébergement. « Nous ne pourrons pas aller plus loin » , prévenait, le 13 mai, Pascale Boistard, adjointe au maire de Paris chargée de l’intégration et des étrangers non communautaires, alors que la municipalité avait annoncé un triplement de son aide ponctuelle.

L’étau s’est aussi resserré sur la frontière franco-italienne. Les arrivées de Tunisiens ont fortement diminué à Nice, d’après les associations locales. « Il y a beaucoup moins de monde à Vintimille [ville italienne à 8 km de la frontière], explique Teresa Maffeis, de l’Association pour la démocratie à Nice (ADN). Un centre de la Croix-Rouge accueille environ 130 personnes, et une trentaine restent à la rue. Mais la tension monte, car c’est psychologiquement très dur pour ceux qui ne font rien de la journée. Ils sont dans un état dépressif avec des moments d’abattement très importants. »

Certains migrants souhaitent désormais rentrer dans leur pays, mais les 300 euros de l’aide au retour volontaire sont jugés insuffisants. La traversée leur a coûté autour de 1 000 euros, souvent au prix d’importants sacrifices dans leur pays.

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