L’encombrante dépouille d’Erich Priebke, le « Barbie italien »

Olivier Doubre  • 16 octobre 2013 abonné·es

Ancien capitaine SS et l’un des responsables du massacre des Fosses ardéatines qui fit 335 victimes parmi des otages en représailles à un attentat de la Résistance contre une garnison allemande en plein centre de Rome, Erich Priebke est mort, le 11 octobre, à l’âge de 100 ans. En Italie, les personnes âgées ne sont pas incarcérées. Il vivait donc en résidence surveillée et pouvait sortir faire ses courses à proximité, toujours sous surveillance policière, essentiellement pour éviter qu’il ne soit agressé. Se pose aujourd’hui la délicate question de sa sépulture, dans un pays où, bien plus qu’en France, la fin de la Seconde Guerre mondiale (de 1943 à 1945) se transforma en véritable guerre civile entre tenants du régime fasciste inféodé à l’Allemagne nazie et futurs représentants de « l’arc constitutionnel » de la première République italienne instituée par le référendum de 1946 (qui bannit la famille royale de la Maison de Savoie).

Le corps d’Erich Priebke embarrasse donc fortement l’Italie. L’Argentine, d’où il fut extradé en novembre 1995 et où sa femme est enterrée, n’a pas réclamé sa dépouille. Et les autorités italiennes ne souhaitent absolument pas lui accorder une place dans un cimetière romain, ni quelque part dans la péninsule, de crainte qu’elle ne devienne lieu de pèlerinage pour quelques néo-nazis ou, bien plus nombreux, néo-fascistes transalpins qui, comme en Grèce, se voient actuellement pousser des ailes entre crise économique et question migratoire. Quelques-uns ont d’ailleurs déjà tenté – en vain – de déposer une gerbe devant le lieu où il est décédé, et des graffitis à sa gloire sont apparus sur des murs de la capitale italienne.

Même l’Église romaine, aujourd’hui à la veille de la commémoration des 70 ans de la grande rafle dans le ghetto de Rome par les nazis, qui eut lieu le 16 octobre 1943, s’est refusée à toute messe en sa faveur. Seule une discrète prière devrait lui être accordée par un prélat. Les autorités ne savent donc que faire de l’encombrante dépouille de celui qui fut souvent appelé le « boucher de Rome », parfois comparé à Klaus Barbie, pour son rôle contre la Résistance. D’aucuns ont évoqué une possible crémation. Mais la formule n’est pas en odeur de sainteté dans un pays où l’Église et le Vatican continuent de peser d’un poids immense sur l’ensemble de la vie publique…

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