Une femme simple

Qui est Jeanne Le Mithouard ? De cette batelière, née à la fin du XVIIIe siècle sur les rives du Golfe du Morbihan, il ne reste rien. Si ce n’est une plaque, à l’entrée d’une impasse baptisée de son nom, dans le petit port du Logeo. Une inconnue, au métier improbable, que la mémoire locale a déjà oubliée.

Dans ce court roman, Cédric Morgan conte ce qu’aurait pu être sa vie. Celle d’une géante, femme parmi les hommes, assez exceptionnelle pour porter un regard libre et affranchi sur le quotidien de ce coin de Bretagne rurale, à l’orée du XIXe siècle. Mais l’auteur tisse surtout l’existence d’une femme ordinaire, qui naît, vit, meurt.

L’héroïne de Cédric Morgan ne demande rien, si ce n’est d’être, tout simplement. Elle ne possède pas davantage qu’une paysanne de l’époque, elle ne court pas les aventures, elle vit au fil des semaines, travaille jusqu’au jour du seigneur. Elle aime tout particulièrement le dimanche, car ce jour-là, elle a du temps, «du temps pour elle» . Le trésor des petites gens.

Et pour raconter les jours qui filent, le passage des saisons et l’attente du marin parti loin, l’auteur manie la langue simple des mots justes. Une litanie de phrases parfois interrompue par une envolée lyrique, bref écart d’écriture, heureusement vite abandonné pour revenir à la force du récit, ancré dans le sol et dans le temps.

• Une femme simple , Cédric Morgan, Grasset, 176 p., 16 euros.