EPR : la polémique nucléaire redémarre de plus belle
Le nouveau retard pris par le chantier risque d’enterrer la promesse de Hollande de fermer la centrale de Fessenheim avant 2017.
Le plus gros fiasco industriel du lobby nucléaire français depuis l’abandon du surgénérateur Superphénix en 1997: voilà le titre auquel peut désormais postuler le réacteur dit « de nouvelle génération » en construction à Flamanville (Manche). EDF vient d’annoncer un nouveau retard dans la mise en service du premier EPR français. C’est le troisième report : il ne devrait être raccordé au mieux qu’en 2017, soit cinq ans (ou plus) après la date initialement prévue. Et la facture finale pourrait s’élever à quelque 9 milliards d’euros, pas loin d’un triplement de l’estimation de départ. Face à cet ogre financier, l’éolien est déjà concurrentiel. Pour peu, le solaire photovoltaïque le sera aussi bientôt.
Les anti-nucléaires ne rateront pas l’occasion de tirer sur l’ambulance. Et puis les malheurs de l’EPR vont réouvrir un front politique saignant : quid de la fermeture de la vieille centrale de Fessenheim, qui approche les 40 ans ? En effet, la loi de transition énergétique, au chapitre nucléaire, se contente de fixer la puissance maximum du parc des centrales — à 63,2 gigawatts (GW), soit sa valeur actuelle. Les écologistes avaient accepté, bon gré mal gré, ce troc perdant : pour que l’EPR (1,6 GW) entre en service, il faudrait fermer Fessenheim (1,8 GW, ou une centrale de puissance équivalente) pour respecter ce plafond. Sauf à supposer que Hollande tienne sa promesse de candidat — nous n’y sommes pas habitués —, le scénario « catastrophe » pour les anti-nucléaires serait le retour de la droite au pouvoir en 2017, qui s’empresserait d’amender la loi de transition énergétique. Bilan : aucune fermeture de vieille centrales, et l’entrée dans le parc d’un EPR somptuaire.