Midterm : Les Américains sanctionnent le bilan économique

Obama a perdu les élections de mi-mandat malgré un bilan économique en apparence très positif. Mais la grande majorité des Américains ne bénéficie pas d’une croissance en hausse.

Lou-Eve Popper  • 5 novembre 2014 abonné·es
Midterm : Les Américains sanctionnent le bilan économique
© Photo: Manifestation d'employés de McDonald's, le 31 juillet 2014, à Chicago (SCOTT OLSON / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Comme prévu , les républicains ont remporté, le 4 octobre, les élections de mi-mandat aux États-Unis. Cette victoire électorale est d’une importance capitale : en prenant le contrôle du Congrès, les républicains vont, pour les deux ans à venir, dicter l’agenda parlementaire jusqu’à l’investiture du successeur de Barack Obama.

Les adversaires du président démocrate ont ainsi conquis le Sénat en passant de 45 à au moins 52 sièges sur 100, selon les projections des télévisions américaines. Ces élections de midterm leur ont aussi permis de renforcer leur majorité à la Chambre des représentants puisqu’ils pourraient gagner 18 sièges, selon la chaine ABC, ce qui leur donnerait la plus large majorité républicaine depuis 1946.

Un bilan économique en trompe-l’œil

Barack Obama avait imaginé que son excellent bilan économique lui permettrait de remporter ces élections de mi-mandat. En effet, alors que les États-Unis sont à l’origine de la crise financière des subprimes, le pays affiche aujourd’hui une éclatante santé économique. La croissance, au troisième trimestre 2014, s’élevait à 3,6 % tandis que le chômage tombait en dessous de 6 %. Et pourtant, ces chiffres encourageants n’ont pas suffi à faire voter les Américains pour le camp des démocrates. Car ces statistiques cachent une réalité quotidienne morose pour une grande majorité des Américains.

Des centaines de milliers de sans-emploi n’ont pas été comptabilisés. Et des millions d’Américains, qui ont réussi à décrocher un emploi, subissent le temps partiel. Comme l’expliquait Vincent Giret, sur France Info ce matin, « la reprise a créé des jobs mais d’abord dans la précarité » . D’autre part, si la croissance a très fortement augmenté ces derniers mois, les salaires réels stagnent et le pouvoir d’achat reste bridé. Ainsi, une majorité d’Américains a encore l’impression que le pays est en récession puisqu’ils ne bénéficient pas, dans leur vie quotidienne, des retombées d’un taux de croissance pourtant excellent.

Les inégalités inquiètent

La sortie de crise n’a pas permis de réduire les inégalités. Elles se sont même accrues et atteignent aujourd’hui des sommets. Selon Janet Yellen, la présidente de la FED, dont le Huffington Post rapportait récemment les propos, les inégalités de revenus et de richesses « se sont à nouveau creusées pendant la reprise aux États-Unis [et] ont quasiment atteint un sommet depuis un siècle » . La stimulation de la Banque centrale américaine, qui devait relancer la consommation, a d’abord profité aux riches, dont les revenus financiers ont été dopés par la Bourse. Traditionnellement aux États Unis, on ne s’inquiète pas des inégalités mais, aujourd’hui, elles constituent un point de crispation.

Un rapport d’Oxfam sur les inégalités , paru fin octobre, tend à prouver que l’immense majorité des Américains dénonce le système inégalitaire du pays. « Dans les recherches visant à comparer les différentes opinions sur une répartition idéale des richesses, l’énorme majorité exprime sa préférence pour une société plus égalitaire » , affirme l’étude. « Aux États-Unis, les personnes interrogées devaient indiquer leur préférence entre deux schémas de répartition. Dans leur immense majorité (92 % contre 8 %), elles ont choisi celui reflétant la répartition observée en Suède contre celle des États-Unis. » [^2]


[^2]: Le rapport d’Oxfam s’appuie ici sur l’ouvrage de J. Stiglitz (2012), The Price of Inequality : How Today’s Divided Society Endangers Our Future, Penguin, p.23

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