Marine Le Pen ne veut voir qu’une seule tête. La sienne.

La présidente du Front national, a nommé un fidèle, proche de son cercle privé, à la tête de la délégation française frontiste au Parlement européen.

Michel Soudais  • 27 janvier 2015 abonné·es
Marine Le Pen ne veut voir qu’une seule tête. La sienne.
© Photos: Michel Soudais

Edouard Ferrand, le député européen choisi par Marine Le Pen pour remplacer Aymeric Chauprade, évincé (voir les raisons de cette disgrâce ici ou ), à la tête de la délégation française du Front national au Parlement européen, est un parfait inconnu médiatique. La notoriété de cet élu, président du groupe FN au conseil régional de Bourgogne, adhérent du parti d’extrême droite depuis 1983[^2] – il avait 18 ans –, n’a guère dépassé jusqu’ici les frontières de sa région. Tout juste s’en est-il éloigné, à la demande de la présidente du FN qui souhaitait faire de la place à des ralliés récents, pour être élu député européen. C’est donc dans la circonscription du Sud-Ouest, où il figurait en 3e position sur la liste conduite par Louis Aliot, compagnon de Mme Le Pen, qu’il a été élu. « Un cadeau pour service rendu » , résumait France3-Bourgogne.

Au sein du FN, c’est plutôt le genre « bon petit soldat », pas le style à ruer dans les brancards ou à faire des vagues. En 2003, il signait avec Jean-Lin Lacapelle, fondateur et vice-président de Générations Le Pen, l’association qui a servi de premier tremplin à Marine Le Pen, un petit ouvrage, Sur tous les fronts (Editions Objectif France), retraçant quatorze « itinéraires de militants » . Avec un chapitre particulièrement hagiographique consacré à… Marine Le Pen.

Cet homme discret , qui s’est spécialisé à Strasbourg sur les dossiers agricoles, semble aussi entretenir de bonnes relations avec un homme clef de la galaxie parallèle mise en place par Marine Le Pen en vue de 2017 (Voir les enquêtes de Marine Turchi sur Mediapart ou cet article de Marianne .

Illustration - Marine Le Pen ne veut voir qu’une seule tête. La sienne.

Sur cette photo prise le 1er mai 2011, en arrière de la tribune où Marine Le Pen prononçait son premier discours à l’issue du traditionnel défilé du FN, on voit Edouard Ferrand en discussion avec Frédéric Chatillon. Cet ancien chef du GUD, relation personnelle de Marine Le Pen, est en charge de l’essentiel de la communication du FN qui l’a toujours présenté comme un prestataire de service extérieur; ce jour-là il portait un badge « FN organisation ».

Cette proximité infirme les interprétations données ici et là à l’éviction d’Aymeric Chauprade. Interprétations selon lesquelles Marine Le Pen aurait voulu marquer ses distances avec son conseiller sur les questions internationales, en raison de ses prises de position trop radicales. Ce n’est pas tant la propension de Chauprade à accréditer la thèse complotiste du grand remplacement ou la théorie du choc des civilisations qui insupporte Marine Le Pen, que le fait qu’il puisse se prévaloir d’une proximité avec elle et de son rang dans la délégation au Parlement européen pour avancer un discours différent de celui qu’elle juge opportun de tenir.
« Il n’y a qu’une ligne » au FN, rappelait Louis Aliot, interrogé sur la sanction visant Aymeric Chauprade, le 23 janvier sur France info. « Ça ne tiraille pas (…). Marine est la présidente du FN, on doit être derrière la ligne qui est incarnée par elle » , soulignait-il. Avec Edouard Ferrand, Marine Le Pen est assurée qu’elle ne verra qu’une tête.

[^2]: Si l’on en croit sa biographie officielle.

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