Les français inquiets pour la sécurité de leurs données

Christine Tréguier  • 22 juillet 2015
Partager :

Selon une enquête réalisée en mai 2015 par Unisys Security Insights, les français n’ont pas franchement confiance dans les différents prestataires à qui ils confient leurs données, qu’il s’agisse des opérateurs téléphoniques, des banques, des commerces, des compagnies aériennes, de l’état et des services publics ou des organismes de santé. A la question « quel est le risque qu’une personne non autorisée y accède accidentellement ou délibérément au cours des 12 prochains mois », ils sont 67% à estimer que la probabilité est plus élevée chez les opérateurs de télécom. 50% pensent que les banques et services financiers ne sont guère plus fiables. Le commerce, les services publics et l’administration suivent avec respectivement 44%, 43% et 41% de craintes exprimées. 34% doutent des compagnies aériennes. Seuls les organismes de santé s’en sortent à peu près bien avec 54% de sondés convaincus que le risque est peu probable.

Quelques actualités récentes viennent, il est vrai, cautionner leurs inquiétudes. En 2014 Orange a du avouer deux piratages de données personnelles clients – au total plus de 2 millions de personnes touchées – ce qui lui a valu un avertissement de la CNIL pour manquement à son obligation de sécurité. Début 2014, le géant américain de la distribution Target a subi une cyberattaque d’envergure visant les données bancaires de 110 millions de clients. En mai c’est le fisc américain qui s’est fait subtilisé des informations concernant 100 000 contribuables. En juin et juillet le Bureau de gestion du personnel (OPM) a subi à son tour une série d’effractions informatiques. 4 millions de fonctionnaires américains ont fait les frais de la première. La seconde fois 21,5 millions de fonctionnaires et leurs conjoints ont été informés que leurs identités complètes mais aussi leur numéro de sécurité sociale et leurs renseignements financiers, judiciaires et médicaux se baladaient dans la nature.

L’enquête d’Unisys Security Insights porte également sur les données collectées par les objets connectés type compteurs, voitures, équipements électroniques de maison, smartphones, tablettes, montres ou bracelets. La crainte la plus partagée (53%) est que les banques et les assurances s’en servent pour connaître leurs habitudes de vie et les profiler. 49% s’interrogent également sur ce que les entreprises qui collectent ces informations pourraient en faire et 37% sont préoccupés par le fait que les services de police y aient accès. L’étude n’aborde pas les autres « voleurs », les sites marchands aux formulaires d’inscriptions toujours plus gourmands en données et les réseaux sociaux auxquels nous confions de notre plein gré la matière première d’un profilage très poussé et d’un juteux commerce à l’échelle planétaire. Ces réseaux sociaux que le blogueur iranien Hossein Derakhshan accuse, dans un article traduit et publié par Libération, de « rétrécir internet ». Emprisonné il y a huit ans, il se souvient d’un web peuplé de blogs où on naviguait de lien hypertexte en lien hypertexte. « Le lien hypertexte était le moyen d’abandonner la centralisation – tous les liens, les files et les hiérarchies – et de la remplacer par quelque chose de plus distribué, par un système de nœuds et de réseaux ». La conséquence la plus effrayante de la centralisation de l’information, ajoute-t-il, c’est le fait qu’elle nous affaiblisse face aux gouvernements et aux entreprises. La surveillance ne fait que se renforcer avec le temps […] Quand, avec seulement 150 likes, Facebook peut nous connaître mieux que nos parents et, avec 300 likes, mieux que notre compagne ou compagnon, le monde paraît bien prévisible, pour les gouvernements et pour les entreprises. Et la prévisibilité, c’est le contrôle. »

{{Sur le web :}} [L'article de Hossein Derakhshan->http://ecrans.liberation.fr/ecrans/2015/07/20/six-ans-apres-internet-se-recroqueville_1351044 ]
Publié dans
Les blogs et Les blogs invités
Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don