Transparency International dresse un bilan mitigé de la première année de Macron à l’Élysée

Lors d’une conférence du presse le 23 avril, l’ONG a présenté un bilan sur la transparence de la vie politique, un an après l’élection présidentielle. Le résultat apparaît très nuancé.

Malika Butzbach  • 23 avril 2018
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Transparency International dresse un bilan mitigé de la première année de Macron à l’Élysée
© Photo : Frederick FLORIN / POOL / AFP

C’est un bilan d’étape qui se tiendra chaque année, prévient Marc-André Feffer, président de l’association Transparency International France, lors d’une conférence de presse tenue ce matin. Le but ? Faire le point sur les engagements pris par Emmanuel Macron et La République en marche aux élections de 2017. « Un an plus tard, où en est-on ? Le bilan est mitigé et contrasté : si les premières pierres ont bien été posées, il ne faudrait pas que le chantier s’arrête brusquement, constate Marc-André Feffer. Si l’éthique et la transparence ne redeviennent pas des priorités politiques, le risque est clair : échouer à rétablir la confiance des Français envers leurs représentants. »

« Il ne faut pas que le soufflé retombe »

La loi visant à « rétablir la confiance dans l’action politique », adoptée en septembre 2017, est prometteuse, analyse Transparency. L’association souligne la pertinence de la suppression de la réserve parlementaire. Un bon début qui doit cependant être complété par d’autres mesures, comme le renforcement des dispositifs de contrôle interne à l’Assemblée nationale et au Sénat, ou le contrôle des finances des groupes parlementaires par la Cour des comptes. « Il est aussi important de rester vigilant quant à l’application de cette loi dans le temps », affirme Marc-André Feffer. Elsa Foucraut, responsable du plaidoyer vie publique de l’ONG, insiste sur le futur chantier :

Cette loi va dans le bon sens, mais s’apparente plus à un ajustement qu’à une véritable réforme de fond. Et surtout, le texte ne doit pas être l’alpha et l’oméga de la politique du gouvernement sur ce sujet.

Mais un grand absent demeure, qui fait craindre à Transparency que le dynamisme insufflé en 2017 ne retombe : aucun débat sur la question de la transparence du financement de la vie politique n’est prévu. « Alors que les trois dernières élections présidentielles sont entachées de soupçons graves d’irrégularités, qu’attend-on pour agir ? » questionne l’organisation.

Des attentes sur la réforme constitutionnelle

La réforme constitutionnelle de l’exécutif semble particulièrement attendue par l’équipe de Transparency International, en premier lieu sur la question de l’indépendance de la justice. Emmanuel Macron a précédemment proposé que les règles de nomination des magistrats du parquet soient identiques à celles qui s’appliquent aux magistrats du siège, avec l’avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. Une bonne manière de limiter le risque d’interférence politique sur les dossiers judiciaires, mais qui, là encore, doit être complétée par une réforme de fond sur l’indépendance des magistrats du parquet. D’autant qu’il « ne saurait y avoir de réelle indépendance sans renforcer les moyens alloués à la justice », insiste l’ONG.

« L’autre bataille qui est devant nous, c’est la question du cumul des mandats », annonce Elsa Foucraut. De nombreuses incertitudes demeurent quant à l’application de cette loi, adoptée en 2014. Alors qu’un seuil limitatif de 9 000 habitants pour les mandats de maire a été annoncé, l’organisation craint qu’une telle limitation diminue la portée du dispositif. Une autre question demeure sans réponse : celle des délais d’application de la réforme. « La mesure doit pouvoir entrer en application dès les prochaines élections, en prenant en compte le nombre de mandats déjà effectués », prône Marc-André Feffer, rappelant que 14 % des parlementaires sont concernés.

Inquiétudes et nets reculs

L’ONG pointe un « retour en arrière » sur les questions du lobbying, notamment l’exclusion des « associations culturelles des registres de représentants d’intérêts », voté dans l’article 38 du projet de loi dit « droit à l’erreur ». Un recul par rapport à la loi Sapin 2 sur les représentants d’intérêts (ou lobbyistes) et responsables publics.

Pour que cet objectif soit rempli, tous les acteurs, publics comme privés, doivent y être inclus. Emmanuel Macron s’était engagé dans ce sens.

Autre inquiétude : la loi sur le secret des affaires. Voté la semaine dernière au Sénat, elle « propose une définition trop large et imprécise, souligne Laurène Bounaud, déléguée générale. Presque toute information pourra potentiellement être placée sous le sceau du secret ». Transparency pointe aussi les problèmes juridiques engendrés par cette loi : « Il ne faut pas que la charge de la preuve pèse sur les lanceurs d’alerte et les journalistes », affirme Laurène Bounaud. Pour l’organisation, c’est un quinquennat qui demandera une certaine vigilance.

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