Au PCF le rassemblement est encore un slogan

Michel Soudais  • 31 janvier 2007
Partager :

Deux jours après avoir présenté son programme à la presse, Marie-George Buffet inaugurait ce soir son Conseil de campagne composée de 100 personnalités, dont quatre «co-présidents».

Depuis le lancement officiel de sa campagne, début janvier, la candidate veut aller vite pour s’imposer comme la candidate qui veut «rassembler la gauche populaire antilibérale» . Mais du désir à la réalité, il y a une marge, qui ressemble aujourd’hui à un fossé infranchissable.

Le 23 janvier, pour son premier meeting de campagne au Zénith, la secrétaire nationale (en congé) du PCF était essentiellement entourée, à la tribune, de communistes et de ceux que l’on appelait autrefois des «compagnons de route». Sur les 6000 personnes venus assister à cette réunion, 1500 venaient de 50 départements non-franciliens, admet la direction du PCF. De tous les collectifs antilibéraux qui, nous disait-on, avait fait le choix majoritaire d’une candidature de Marie-George Buffet, seul celui de Montargis (Loiret) affichait son soutien en pancartes.

La présentation du programme [^2] était une seconde étape qui devait montrer que la candidate reprenait à son compte les 125 propositions adoptées en octobre à Nanterre. «Ce programme , écrit Mme Buffet en préambule, est le fruit du travail commun qu’ensemble, communistes, socialistes, républicains, écologistes, militants d’extrême gauche, syndicalistes, altermondialistes ou féministes, nous avons élaboré pour construire un programme antilibéral.»

Sous réserve d’un inventaire complet, l’essentiel y est. Dans le détail c’est une autre histoire. Il a fort à parier que les écologistes, par exemple, n’y trouveront pas leur compte : ce programme se prononce «pour un nucléaire sécurisé et durable» , «l’EPR et les générateurs de la quatrième génération ainsi que ITER» . Tout en maintenant l’idée d’organiser «un grand référendum» sur les choix en matière énergétique, Marie-George Buffet a indiqué, lundi, devant la presse, que «la construction de l’EPR à Flamanville devra être soutenue» .

Avec son Conseil de campagne , la candidate de la gauche populaire antilibérale n’ignorait pas qu’elle présenterait en quelque sorte sa carte de visite. Installé dans de modestes locaux du PCF, boulevard Vincent-Auriol, à Paris (13e), ce Conseil de campagne comprendrait, selon Francis Parny, l’un de ses co-présidents, 25% de représentants du PCF. Les présidents des groupes parlementaires communistes à l’Assemblée nationale, au Sénat et au Parlement européen, les présidents des conseils généraux de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, le président de l’Association des élus communistes et républicains, le directeur de l’Humanité y figurent ainsi en bonne place. Mais les syndicalistes Thierry Dumez ou Jean-Paul Israël (CGT-SNCM) sont aussi notoirement membres du PCF. Brigitte Dionnet, présentée comme «militante féministe» , siège au comité exécutif national du PCF. Le député de l’Aisne, Jacques Dessalangre, ancien membre du Mouvement des citoyens, est membre du groupe communiste et républicain, etc.

A l’exception de Roberto Ferrario , responsable du site Bellaciao, dont la nouvelle orientation est controversée (voir mon précédent post), et de Jean-Luc Gonneau , animateur du Cactus-La Gauche, un réseau de républicains sociaux, qui siégeait au collectif d’initiative unitaire national, on ne trouve guère de surprise dans cette liste.

### Défections au sein du PCF

La composition de ce Conseil de campagne masque mal les difficultés qu’éprouve la candidate du PCF à rassembler dans son propre parti.

Si Daniel Fontaine, le maire d’Aubagne, et Daniel Belviso, le président de la communauté d’agglomération du pays d’Aubagne et de l’Etoile, n’avait pas demandé à Marie-George Buffet de retirer sa candidature, tout récemment encore en signant un «appel d’élus qui ne se résignent pas», point n’eut été besoin d’aller sortir de sa retrait Jean Tardito, député honoraire d’Aubagne, pour lui demander de figurer dans ce Conseil.

Lors du vote interne, en décembre, près de 10000 communistes avait voté pour une autre candidature. Ces contestataires, qui se présentent comme des «communistes unitaires», se structurent et
traînent les pieds pour entrer en campagne quand ils ne refusent pas tout bonnement de la faire.

C’est le cas de Patrice Leclerc, conseiller général de Gennevilliers et ancien secrétaire de la fédération des Hauts-de-Seine du PCF, qui refuse de parrainer Marie-George Buffet. Il l’a fait savoir dans une letttre à sa direction fédérale, publiée sur son site.

Un cas qui n’a rien d’isolé et confirme l’analyse que nous faisions avant Noël ici-même.

[^2]: Télécharger le programme de M.-G. Buffet (Pdf)

Temps de lecture : 4 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don