L’envers et l’endroit

Michel Soudais  • 27 janvier 2007
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Coup de téléphone d’un ami, jeudi matin: «Tu es en photo dans Le Point page 32-33 derrière Ségolène Royal et François Hollande. Tu as des roses sur la tête, mais surtout tu es le seul à faire la gueule!» De l’avis de ce pince-sans-rire, les enquêteurs de l’hebdomadaire de la droite libérale doivent déjà être sur mes traces. C’est vrai quoi, ne pas sourire quand on a la chance d’être aux côtés de la plus souriante des candidat(e)s… Par les temps qui courent, c’est un crime de lèse-royalisme.

A cette heure mâtinale où j’émerge à peine d’un sommeil réparateur après un week-end à Montreuil et un bouclage toujours difficile, je n’ai pas encore lu la presse du jour. Et si je devine les circonstances de cette prise de vue, j’ai hâte de la découvrir. J’accélère donc le train pour rejoindre Politis , où je sais qu’un exemplaire nous arrive toutes les semaines.

Avant d’expliquer la raison de mon visage boudeur , je ne résiste pas au plaisir de vous scanner ce cliché. Je sais: ce n’est pas bien de copier, mais après tout je suis sur l’image… Qui plus est entre l’épaule de Ségolène et son micro.

Je rassure tout de suite les fans de «la candidate de la morale de l’action» (si l’un d’eux pouvait être assez aimable pour m’expliquer ce que cette expression signifie exactement, je lui en serais reconnaissant), elle n’est nullement responsable de ma moue. Il m’est arrivé maintes et maintes fois, dans l’exercice de mon métier, de me trouver en compagnie plus désagréable sans pour autant arborer une tête d’enterrement.

Mais ce que l’image parue dans Le Point ne montre pas, et dont aucun lecteur ne se doute, c’est l’incroyable désordre qui a permis de fabriquer cette belle icône de la candidate de l’ordre juste. Car de la position privilégiée où je me trouvais, c’est un tout autre spectacle qui s’offrait à ma vue. Un spectacle auquel les festivaliers de Cannes sont plus coutumiers que les journalistes politiques. Jugez plutôt ce qu’en a retenu l’appareil photo de mon téléphone.

Cet envers du décor est plus vrai que l’endroit. Si ce lundi 22 janvier, Ségolène Royal avait convié la presse à l’inauguration de son local de campagne, au siège du PS, ce n’est pas pour admirer le décor kitch du cyber café de la candidate que photographes, cameramen et journalistes se pressaient.

Après les petites divergences politiques observées entre le Premier secrétaire du PS et la candidate des Désirs d’avenir, et interprétées comme une rupture dans le couple, tous ne semblaient être là que pour voir François Hollande, patron des lieux, accueillir Ségolène Royal. Scruter le moindre petit signe entre eux.

Ce fut une belle bousculade. Juste pour une image… artificielle.

Temps de lecture : 3 minutes
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