Parrainages: la grande hypocrisie

Michel Soudais  • 24 février 2007
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« Accorder un parrainage, ce n’est pas exprimer un soutien ni donner une consigne de vote, c’est tout simplement choisir de faire vivre la démocratie » , a déclaré hier Brice Hortefeux, dans un entretien au Figaro. On ne négligera pas la portée de cette déclaration.

D’abord parce M. Hortefeux est ministre délégué aux Collectivités locales. Cette fonction lui confère quelque autorité sur les élus locaux, non pour leur dicter leur conduite mais pour rappeler les termes et l’esprit de la loi. Ce qu’il fait précisément ici en rappelant la portée (politiquement limitée) d’un acte de parrainage et néanmoins son importance. Car il s’agit tout simplement de «faire vivre la démocratie », ce que plusieurs personnalités, dont Jean-Claude Amara, Juliette Binoche, Mgr Gaillot ou Charles Piaget, ont aussi rappelé dans un appel aux maires pour qu’ils signent en faveur de José Bové.

Brice Hortefeux aurait été parfait s’il s’était contenté de ce rappel. Mais dans le même entretien, il suggère d’ «engager une réflexion soit sur le nombre de parrainages soit sur la publicité donnée aux signatures» . C’est ainsi qu’il évoque «la création d’une voie d’accès alternative à la candidature : le recueil d’un nombe significatif de signatures de citoyens, à l’instar de ce qui se fait en Autriche, au Portugal, en Finlande» . C’est se moquer des électeurs.

A quoi cela rime-t-il de vouloir engager une réflexion alors que la collecte des signatures est engagée? Et qu’il est trop tard pour modifier la loi? En outre, la voie alternative évoquée par M. Hortefeux n’est pas nouvelle. Je l’avais évoquée dans Politis en mars… 2002, quand la difficulté des petits candidats à recueillir leurs parrainages faisait déjà l’actualité. Depuis près de deux ans qu’il est ministre, Brice Hortefeux aurait eu le temps nécessaire (et même plus) pour mettre en pratique ses suggestions, si vraiment il l’avait voulu .

Sa tardive déclaration lui a moins été dictée par sa fonction que par les intérêts politique et électoraux de son ami et supérieur (au gouvernement), le ministre-candidat Nicolas Sarkozy. Celui-ci ne veut surtout pas qu’on puisse lui imputer une quelconque responsabilité dans le fait qu’un candidat représentatif n’aurait pas pu obtenir ses signatures. Brice Hortefeux n’a donc fait qu’ouvrir le parapluie. Il n’est pas le seul.

Avant lui, nous avions entendu Dominique de Villepin déclarer, le 10 novembre: « Dans la vie d’un grand pays démocratique comme la France, il est important que tous ceux qui expriment une opinion et qui trouvent un écho dans la vie de notre pays puissent se présenter à l’élection présidentielle. » Quels ont été les actes?

Dans un registre moins général, François Hollande estimait souhaitable, fin janvier, la candidature de Dominique Voynet. Celle-ci attend toujours un geste qui lui permette de passer du souhaitable au possible.

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