Sarkozy, le vin et G.W. Bush

Michel Soudais  • 23 février 2007
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«Je vais vous dire un truc qui va vous décevoir, je ne bois pas de vin.» Cette confidence de Nicolas Sarkozy à un jeune manutentionnaire montpellierin qui aurait bien bu un verre de vin avec lui, est passée inaperçue. C’était pourtant sur TF1, le 1er février, devant plus de 8 millions de téléspectateurs! Sur le plateau, PPDA a bien tenté d’en savoir plus: «Vous n’encouragez pas la filière agricole ?» Mais le ministre-candidat n’a pas daigné répondre. Et personne ne s’est ému de cette confidence. Etonnant dans un pays aussi viticole que le nôtre!

Une enquête de la Revue du vin de France, en kiosque aujourd’hui, permet de revenir sur cette incongruité. Ce mensuel de sérieuse réputation s’est penché sur les rapports des candidats à la présidentielle avec le vin. Si certains «sont de véritables connaisseurs» , d’autres «s’y intéressent par obligation» .

Dans la première catégorie, les journalistes de la RVB rangent incontestablement Dominique Voynet . C’est «la plus « calée » de tous les prétendants» , «une authentique initiée» , écrivent-ils, en notant qu’elle «peut citer des dizaines de bons vignerons du Jura, et pas seulement des « bio »» . Selon la RVF, «son cousin altermondialiste José Bové est à peine moins calé» . Mais ça, on s’en doutait un peu.

Royal «militante du cognac-soda»

Dans la seconde catégorie, on trouve Ségolène Royal. Jeune, elle «ne s’était pas intéressée à un produit souvent réservé aux hommes. Mais l’animal politique Royal, au contact de François Mitterrand (…) a appris que la table et le flacon étaient les deux piliers de l’art de vivre à la française» , écrit le magazine. Désormais, elle «aime» le vin et «évoque volontiers mets et vins, consciente qu’ils font partie d’une identité française qu’elle cherche à incarner» . La présidente du Poitou-Charentes, région célèbre pour son cognac, est «une militante du cognac-soda» .

Mais c’est Nicolas Sarkozy qui se distingue. «Le président de l’UMP est le seul des candidats à la magistrature suprême à fuir l’onction bachique» , note la RVB. «En fait, il ne boit pas une goutte d’alcool. Il n’en a jamais eu le goût (…) Et juge l’alcool absolument inconciliable avec un rythme effréné d’activité.» Et comme ce n’est pas à Neuilly que le ministre-candidat aurait pu côtoyer le monde viticole, il ne sait même pas faire bonne figure dans les séances de dégustation.

Du coca plutôt qu’un Cheval Blanc

La RVB rapporte à ce sujet l’anecdote savoureuse d’un vigneron: «On servait du Latour et du Yquem. Je lui ai mis les vins sous le nez, mais j’ai tout juste réussi à les lui faire sentir.»

Là, un souvenir me revient. Le 6 juin 2004, Jacques Chirac avait convié à déjeuner à l’hôtel de ville de Caen tous les chefs d’Etat et de gouvernement, ainsi que les rois et reines participant aux commémorations du 60e anniversaire du débarquement. Pour accompagner cette agape, le sommelier de l’Elysée avait fait servir du Cheval Blanc, le célèbre premier grand cru de Saint-Emilion, d’un très bon millésime. Devinez comment George W. Bush a apprécié cet hommage? Le rustre Texan a demandé un… coca-cola.

Quand on vous dit que Nicolas Sarkozy est le plus américain de nos candidats…

Temps de lecture : 3 minutes
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