Sarkozy, roi de l’immobilier

Ainsi donc, Nicolas Sarkozy et son épouse Cécilia ont bénéficié en 1997 d’un rabais «d’au moins 300.000 euros» lors de l’achat de leur appartement de Neuilly. Résumée de cette façon sur la plupart des chaînes de télé et radios, ce soir, l’enquête que publie demain le Canard enchaîné ressemble a une de ses boules puantes que les candidats à la présidentielle s’envoient traditionnellement à la figure. On annonce la nouvelle, on donne le démenti de Sarko et le tour est joué. Certains de nos confrères poussent même la docilité jusqu’à faire état du démenti du ministre-candidat avant même d’évoquer le sujet de l’enquête qui chagrine tant l’ami de leur patron. Circulez y a rien à voir!

Des mauvaises langues notent que l’Agence france presse (AFP), tôt informée du contenu de l’enquête de l’hebdomadaire satirique, aurait elle-même tardé à répercuter l’information dans l’attente de la réaction de Nicolas Sarkozy. Annoncée dans une courte dépêche diffusée à 17h22, elle n’a précédé que de 6 minutes la dépêche (plus longue) faisant état du démenti de ce dernier. Démenti qui s’est étoffé au cours de la soirée.

Ristourne et travaux à l’œil

Que dit au juste l’enquête du Canard enchaîné ?

1. Les Sarkozy ont tout d’abord obtenu «une ristourne de 12 à 35%» sur le prix au mètre carré de leur logement – revendu depuis -, en payant l’ensemble de 233 mètres carrés à «un coût moyen de 24.636 francs le mètre carré» , soit 5.747.670 FF (876.000 euros). Or, selon Le Canard qui a effectué des recherches à la conservation des ypothèques, les prix dans la résidence concernée en 1997 s’échelonnaient entre «27.871 FF et 37.624 FF» le mètre carré.

2. M. Sarkozy «n’a pas seulement bénéficié d’un prix de vente amical» , mais aussi «obtenu que son nouvel appartement soit aménagé sur mesure et à grand frais par le promoteur» . Celui-ci aurait ainsi pris a sa «seule charge» le coût de la réunion de deux appartements en un seul duplex, soit «925.002 FF TTC» , et a aussi réglé plus de la moitié de travaux complémentaires (réalisation d’une «baie vitrée» , d’un «escalier en chêne ciré» , d’un «dallage en marbre» notamment) coûtant au total «907.535 FF TTC» . «Au total, entre les réductions sur le prix d’achat, le chantier de transformation» de deux appartements initiaux en duplex «et les travaux d’embellissement, les Sarkozy ont économisé au moins 2 millions de francs (300.000 euros)» .

3. Le promoteur Lasserre, avec qui les Sarkozy ont traité, était «le promoteur favori de la mairie de Neuilly» . Et l’un des principaux annonceurs du journal municipal.

4. L’immeuble dans lequel M. Sarkozy avait acheté son appartement était situé dans une zone d’aménagement concerté confiée à la SEM 92, une société d’économie mixte «aux ordres du conseil général des Hauts-de-Seine» , alors présidé par M. Pasqua.

   «Je rêve d’avoir une maison»

Alors que 3 millions de Français souffrent de mal-logement, et que les prix de l’immobilier s’envolent, ces révélations sont du plus mauvais effet pour un candidat qui a lontemps été au commande d’une ville qui ne s’est jamais préoccupée de construire des logements sociaux.

Elles ridiculisent Nicolas Sarkozy qui, pas plus tard que dimanche dernier, interrogé sur ce qu’il ferait s’il gagnait le gros lot à la loterie nationale, déclarait sur M6: «Je m’achète une maison (…) Je n’en n’ai pas. J’avais un appartement que j’ai vendu, je suis maintenant locataire. Mais je rêve depuis longtemps d’avoir une maison pour y mettre ma famille.» Cet autoportrait d’un candidat-ministre en SDF était osé!

Elles relancent enfin les interrogations sur le patrimoine de Nicolas Sarkozy. Quand tous les candidats, suite à la mise en cause du montage immobilier de Ségolène Royal par des responsables de l’UMP, ont présenté le détail de leur patrimoine, le ministre de l’Intérieur est resté vague. Des questions ont été posées, notamment sur le site [betapolitique](http://www.betapolitique.fr/spip.phpquestions ont été posées?article0222), qui sont restées sans réponse. Entre autres celle-ci: comment, en possédant un appartement acheté 876 000 euros en 1997 et revendu 1,9 millions d’euros en 2006, Nicolas Sarkozy a-t-il pu échapper à l’ISF en 2005?

On brûle d’impatience de connaître la réponse.