Les masques tombent (2eme partie)

Michel Soudais  • 30 avril 2007
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Pour de nombreux commentateurs, Nicolas Sarkozy se serait d’abord adressé, hier, à Bercy, aux électeurs centristes. Aveuglement ? Hypnose collective ? Ou complaisance ? Nous n’avons pas dû assister au même meeting.

Car en se lançant dans une longue, très longue, diatribe contre « l’idéologie de Mai 68 » , en affirmant détester la repentance ( «car je suis fier de l’histoire de France» , dit-il), en plaçant la France au-dessus de la République [^2], Nicolas Sarkozy continue de placer ses pas sur voies tracées par l’extrême droite . Comme il l’avait fait en proposant la création d’un «ministère de l’immigration et de l’identité nationale».

Pour Nicolas Sarkozy, Mai 68 est responsable de tout: de l’indifférenciation «entre le bien et le mal, entre le vrai et le faux, entre le beau et le laid» , de la disparition des valeurs, de la morale et de la hiérarchie, de l’autorité et de la politesse, de la faillite de l’école, «du cynisme dans la société et dans la politique» (Sarko enfant de 68?), du communautarisme, des dérives du capitalisme financier (culte de l’argent roi, profit à court terme, spéculation) et même «des parachutes en or, des retraites chapeaux et des patrons voyous» … Comme si Mai 68 avait inventé le capitalisme mondialisé! Jean-Marie Le Pen lui même n’y avait pas songé.

A suivre le président de l’UMP, « la France n’a peut-être jamais connu une telle crise d’identité dans son histoire, sauf peut-être du temps de Jeanne d’Arc et du traité de Troyes » [^3], soit il y a plus de 575 ans… Oubliés l’Occupation! A la trappe les interrogations existentielles consécutives à la Guerre de 1870 et à la Commune de Paris, qui ont nourri l’œuvre d’Ernest Renan! De la gnognotte que tout cela!

«Je veux tourner la page de Mai 68. Mais il ne faut pas faire semblant» , annonce le candidat de l’UMP qui «propose aux Français de renouer en politique avec la morale, avec l’autorité, avec le travail, avec la nation» . Et se rêve en artisan de «la grande réforme intellectuelle et morale dont la France a une nouvelle fois besoin» . Rappelons que le dernier homme politique en exercice qui a voulu imposer à la France une réforme intellectuelle et morale était Maréchal. Son nom? Philippe Pétain.

[^2]: Nicolas Sarkozy conclut désormais ces discours par cette formule : « Vive la République ! Et par dessus tout, vive la France ! » Une proclamation révélatrice du peu conscience républicaine de ce candidat à la présidence de la… République et du danger que représenterait pour celle-ci son élection.

[^3]: Une thématique qui constitue le leitmotiv des discours de Jean-Marie Le Pen chaque 1er mai depuis que le président du FN a fondu en une seule manifestation la fête du travail et l’hommage à la «Sainte de la patrie».

Temps de lecture : 2 minutes
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