L’ami du couple Hollande-Royal au gouvernement

Michel Soudais  • 19 mai 2007
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Bien moins connu que Bernard Kouchner ou Eric Besson, le nouveau secrétaire d’Etat aux affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet n’est pas seulement un grand commis de l’Etat membre des «Gracques», ce collectif d’anciens collaborateurs des gouvernements socialistes, fervents défenseurs du social-libéralisme, qui militaient dès avant le premier tour de la présidentielle pour un «accord de gouvernement» entre le PS et l’UDF de François Bayrou. Agé de 53 ans, Jean-Pierre Jouyet est aussi (et surtout) un intime du couple Hollande-Royal.

Jean-Pierre et François se sont rencontrés en 1977 lors de la période de trois jours de préparation au service militaire, au Fort de Vincennes. Le premier était fils d’un notaire normand, élu gaulliste dans l’Eure. Le père du second était médecin ORL à Rouen, tendance Tixier-Vignancour, avant de s’installer à Neuilly. Ils étaient ensemble à l’ENA au sein de la désormais fameuse promotion Voltaire avec Ségolène Royal, Michel Sapin, Frédérique Bredin, Dominique de Villepin, Renaud Donnedieu de Vabres ou Henri de Castries, le patron de l’assureur Axa… Ils ne sont jamais quitté depuis. Depuis 1999, Jean-Pierre Jouyet est notamment président d’honneur du très deloriste Club Témoin, dont François Hollande fut le président de 1993 à 1997. D’où l’embarras du patron du PS aujourd’hui, perceptible à quelques contradictions.

Première contradiction: «Jean-Pierre Jouyet dit avoir adhéré au PS en 2006, pour accompagner son ami François Hollande» , rapporte Le Monde (19 mai). Il avait pris une adhésion à 20 euros? Interrogé par l’AFP, François Hollande assure au contraire que le nouveau secrétaire d’Etat aux affaires européennes n’était pas membre du PS. Un des deux ment.

Deuxième contradiction: «Je le connais depuis plus de trente ans, ses convictions sont à droite» , déclare aujourd’hui le numéro un du PS à l’AFP. Quelques heures plus tôt, la même agence de presse rapportait ces propos récents de François Hollande sur son ami: «Il est issu d’une famille gaulliste mais ses engagements sont à gauche» [^2].

Si les convictions de Jean-Pierre Jouyet sont effectivement à droite et que François Hollande les connaît depuis plus de trente ans, pourquoi le Premier secrétaire a-t-il accepté son adhésion au PS en 2006? A supposer que le nouveau secrétaire d’Etat du gouvernement Sarkozy-Fillon n’en ai jamais été membre, le patron du PS peut-il nous expliquer comment quelqu’un dont les convictions ont toujours été à droite a-t-il pu être directeur de cabinet de Roger Fauroux, ministre de l’Industrie dans le gouvernement de Michel Rocard, de 1988 à 1991? Par quel miracle a-t-il ensuite pu intégrer le cabinet de Jacques Delors à la Commission européenne, jusqu’à en devenir le directeur (1991-1995)? Et mieux encore, comment un homme aux convictions de droite a-t-il pu devenir en 1997 le directeur adjoint de cabinet de Lionel Jospin à Matignon, et s’y maintenir jusqu’en 2000, date à laquelle il est nommé directeur du Trésor?

[^2]: C’est «une personnalité extrêmement ouverte et attachante» , mais «avant tout un homme compétent, un haut fonctionnaire de grande qualité, qui a su travailler avec les ministres des Finances de toutes les majorités successives» , déclarait aussi le patron du PS. Avant que son ami ne soit débauché par Nicolas Sarkozy.

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