Cannes 2009 : un palmarès très décevant

Christophe Kantcheff  • 24 mai 2009
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Voici mon rapide commentaire, prix par prix, du palmarès du festival de Cannes 2009. Dans le numéro du journal à paraître jeudi, je reviendrai plus en détail sur ce palmarès, très décevant à mes yeux, et sur cette 62ème édition, qui fut, elle, de bonne tenue.

Palme d’or : le Ruban blanc de Michael Haneke

Isabelle Huppert, présidente du jury, récompensée à Cannes grâce à un film de Michael Haneke, la Pianiste , récompense à son tour son bienfaiteur. Ce qui était prévisible s’est hélas produit. Ce qui ne serait pas si grave si le film s’imposait. Il s’impose, oui, mais par sa pesanteur et son didactisme.

Grand prix du jury : Un Prophète de Jacques Audiard

Rate la palme d’une marche. C’est dommage, tant Un prophète marque l’accession de Jacques Audiard parmi les très grands réalisateurs.

Prix exceptionnel du jury : Alain Resnais

Alain Resnais « devait » être au palmarès. C’était comme une obligation morale. Mais il y avait bien d’autres manières de le récompenser que de créer ce « prix exceptionnel pour l’ensemble de sa carrière et sa contribution exceptionnelle à l’histoire du cinéma » , qui fait un peu enterrement de première classe, et surtout évacue totalement son film en compétition, les Herbes folles , beaucoup plus « folles » , en effet, que le pensum d’Haneke.

Prix d’interprétation masculine : Christoph Waltz pour Inglourious basterds de Quentin Tarantino

Totalement justifié. Cet acteur de 52 ans jusque-là inconnu hors de l’Autriche (son pays) et de l’Allemagne, est fantastique en colonel nazi retors, obsédé par la traque des Juifs. Tahar Rahim, qui incarne magnifiquement le héros d’ Un Prophète , méritait lui aussi le prix.

Prix d’interprétation féminine : Charlotte Gainsbourg pour Antichrist , de Lars von Trier

Impossible de dissocier la comédienne du film. Elle y est comme fondue. Charlotte Gainsbourg s’est donnée corps et âme à un cinéaste qui est un manipulateur odieux de grand talent.

**Prix de la mise en scène : Brillante Mendoza pour *Kinatay

Le cinéaste philippin était également à Cannes l’an dernier avec Serbis , supérieur à Kinatay , mais il était reparti bredouille. Kinatay souffre de longueurs et d’un symbolisme parfois trop appuyé. Mais l’effroi qu’il transmet, et que ressent le personnage principal, un jeune apprenti policier, n’a rien de gratuit.

Prix du scénario : Nuits d’ivresse printanière de Lou Ye

Ce n’est pas la récompense qui lui convient. Le jury aurait mieux fait de distinguer la mise en scène, notamment pour ces séquences de sexe et d’intimité entre deux hommes filmées en clair-obscur avec tellement d’empathie.

Prix du jury : ex-aequo Fish Tank d’Andrea Arnold et Thirst, ceci est mon sang de Park Chan-wook

[ Fish tank est un film sans aucune surprise, se calant paresseusement dans la tradition du cinéma social anglais. Thirst, ceci est mon sang… : pas vu.

Les oubliés du palmarès qui, selon moi, auraient mérité, d’une façon ou d’une autre, d’y figurer :
Vincere de Marco Bellocchio et The Time that remains d’Elia Suleiman en premier lieu. Puis Vengeance de Johnnie To, Visage de Tsai Ming-liang, et Étreintes brisées de Pedro Almodovar.

Temps de lecture : 3 minutes
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