Niches fiscales: que valent celles qui encouragent hypocritement les gestes écologiques ?

Claude-Marie Vadrot  • 9 juillet 2010
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Tout à sa frénésie de trouver de l’argent pour compenser (entre autres, bien sur) les 30 millions versés en 2008 à Liliane Betancourt (combien en 2009, au fait ?) et les méfaits du bouclier fiscal, le gouvernement met en scène l’un des « ### éléments de langage » inventé par les communicants de l’Elysée et il « rabote » ce qu’il appelle les niches fiscales. Ce qui, au passage, et c’est l’objectif politique final, permet de mettre dans le même grand sac fiscal, l’aide au logement pour les étudiants, l’aide aux handicapés, les minimum sociaux, le financement des associations de bénévoles, le cadeau de 3 milliards aux restaurateurs, l’exonération pour les heures supplémentaires, les investissements dans les départements et territoires d’outre-mer, les investissements dans la construction de l’immobilier de loisir, les travaux pour l’isolement des logements anciens ou récents, l’aide à la production d’éthanol, l’investissement pour la recherche, les exonérations de charges pour les entreprises qui s’obstinent à payer leur salariés aux SMIC (6,95 euros net…) ou le recours aux énergies renouvelables. En tout 468 possibilités de réduction, de crédits, d’exemption ou d’annulations d’impôts.

Dans le cadre de ma série de remarques considérées par un certain nombre de lecteurs comme ce qu’ils appellent mon « virage à droite » et mon enrôlement dans la propagande gouvernementale, que l’on me permette encore quelques observations qui risquent d’aggraver mon cas.

Autant l’aide à l’isolement des logements me parait justifier les 5,15 milliards d’euros qui y ont été consacrés en 2009 parce que cette mesure concerne tout le monde, à commencer par les propriétaires et les locataires les plus modestes auxquels il permet d’espérer la réduction de leur facture de chauffage hélas souvent électrique pour diminuer la facture des entrepreneurs, autant la participation de l’Etat à l’installation de panneaux solaires (voltaïques ou thermiques, environ 800 millions d’euros) me parait poser problème ou mériter réflexions.

En effet, en liant la démarche « écologique » à un seul intérêt financier pour des gens qui ont les moyens d’investir dans des installations solaires, le pouvoir occulte la nécessaire prise de conscience qui doit ou devrait conduire tous ceux qui le peuvent (et en ont les moyens) à opter pour une énergie au moins en partie plus écologique. La question du passage progressif aux installations solaires pour réchauffer l’eau et aux panneaux produisant de l’électricité, ne devrait pas être guidée par la seule opportunité financière mais par un choix de société, par une volonté de participer à l’anticipation de la fin du pétrole et à la lutte contre le réchauffement climatique. Cela me fait penser à la prime à la casse qui a « payé » des citoyens pour qu’ils jettent leur bagnole et achètent une voiture neuve, ce qui me parait réduire à bien peu de chose le gain écologique. Je pense aussi au bonus qui facilité l’achat de petites voitures qui sont à 90 % fabriquées, après transport vers les usines d’une partie des pièces détachées, à 1000 ou 2000 kilomètres du territoire français où elles sont vendues ; où est alors l’économie de gaz à effet de serre puisque ces milliers de véhicules reviennent en France à bord de camions ? Ceci étant évidemment à rapprocher de la remise à beaucoup plus tard la taxe qui devait frapper le transport routier….

Je livre cette réflexion à vos commentaires ou à vos critiques tout en soulignant à quel point Plenel, Bonnet et les autres de Mediapart ont fait un sacré bon travail.

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