Nathalie Kosciusko-Morizet en touriste à Cancún

Patrick Piro  • 10 décembre 2010
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Certes, aux sommets climat de l’Onu, c’est l’Union européenne qui négocie, pour le compte des pays membres. Mais on connaît l’amour propre national : la France, même quand elle n’a rien à apporter, reste revendicatrice dans les enceintes internationales. Aussi le numéro de figuration exécuté à Cancún par la ministre de l’écologie Nathalie Kosciusko-Morizet en dit long sur les ambitions de Sarkozy pour son nouveau gouvernement. Ça commence par l’embarquement de sa ministre en Inde pour une lourde visite dont le fait saillant restera la vente de deux réacteurs nucléaires EPR à New Delhi. La compagnie de NKM était sûrement prioritaire, au point de ne la lâcher que pour une arrivée mercredi à Cancún. Là-bas, la présidence mexicaine de la conférence souhaitait lui confier le co-pilotage, avec le Brésil, du groupe de contact sur la suite à donner au Protocole de Kyoto qui contraint les pays industrialisés à réduire les émissions de gaz à effet de serre. C’est le Royaume-Uni qui remplacera la France dans cette tâche-clef des négociations.

Illustration - Nathalie Kosciusko-Morizet en touriste à Cancún

NKM n’a rencontré les ONG, ravies par tant de considération, qu’après avoir prononcé son discours en séance plénière, jeudi. Mais il n’y aura guère de dégâts collatéraux tant son contenu montra profil bas, compilant des engagements déjà vieux de plusieurs mois. Entre-temps, l’Espagne déclarait, comme l’Allemagne, le Danemark et le Royaume-Uni, son soutien à l’objectif de porter de 20 % à 30 % le taux de réduction des émissions de l’Union européenne à l’horizon 2020. L’annonce que la France « mobilisera » 420 millions d’euros par an pour les premiers efforts d’aide aux pays pauvres face au dérèglement climatique émut peu : un rapport publié par le Réseau action climat et Oxfam-France révélait il y a trois semaines qu’il s’agissait essentiellement de recyclage de fonds déjà engagés au titre de la coopération internationale.

Deux points saillants cependant dans les propos de la ministre : alors que Sarkozy bataillait l’an dernier au sein du sommet climat Onu de Copenhague pour faire adopter (en vain) des mécanismes de financements « innovants » (du type taxe aérienne ou maritime), il se garde le morceau pour le G20 — dont la France vient justement de prendre la présidence pour un an. Et puis l’annonce d’un partenariat « mondial » signé au Mexique avec le Kenya « sur l’accès aux énergies propres en Afrique et dans les pays les plus vulnérables ». C’est sur le mot « propre » que l’on tique : dans le jargon officiel français, ça inclut le nucléaire. New-Delhi, Cancún : après que son ministère a perdu le dossier de l’énergie, qui a regagné le giron du ministère de l’industrie, NKM tenterait-elle de piquer le nucléaire à son collègue Besson ?

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