Forum mondial science et démocratie : de la confusion à la conclusion

L’épuisement avait déjà gagné les participants du forum mondial Science et démocratie lorsque, vers 20h ce 5 février à Dakar, les traducteurs ont rendu leur tablier et que tout s’est arrêté en quelques minutes pendant la séance de conclusion. Après deux jours de débats, les participants commençaient à se connaître, les discussions avançaient, des propositions concrètes émergeaient. Pourtant c’était fini. Maintenant, même si l’exercice était frustrant et pouvait paraître futile : il fallait conclure !

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Jusque là les débats étaient calmes, il n’y avait presque pas eu de débordements. Le FMSD n’est pas le forum social mondial, qui donne souvent lieu à des discussions épiques. Pourtant, ce soir là, les esprits commençaient à s’échauffer. Les synthèses des ateliers avaient pris plus de temps que prévu de même que les premières parties de la conclusion.

La séance s’est même terminée sans système sonore ni traduction car les techniciens avaient commencé à remballer leur matériel : l’heure de fin théorique était dépassée depuis longtemps. La moitié des participants avait quitté la salle, lassés par la lenteur des procédures ou voulant discuter en privé avant la dispersion générale.

Quand Pat Mooney, de l’ETC group, a vu que la salle commençait vraiment à se vider, il a interrompu les débats : « Point of order ! ». L’anglais avait été naturellement adopté une fois la traduction perdue. Il continua en expliquant que puisque plus de la moitié de la salle avait quitté les lieux, les débats n’avaient plus vraiment de sens.

Lionel Larqué de l’association « Les petits débrouillards », dirigeait cette séance de conclusion. Responsable de la structure du forum, il était partisan de continuer pour ne pas gâcher le travail accompli jusque là. Mais devant la confusion et la perte de nombreux participants, il proposa de changer la méthode de travail.

Rédaction improvisée de l’appel du FMSD pour Rio + 20 Des mesures drastiques furent adoptées : une demie heure pour finir la séance, repousser la mise en place de certaines mesures concrètes à une réunion du lendemain et décider quels points y aborder. La décision la plus immédiate fut de commencer la rédaction d’un grand appel aux scientifiques et aux activistes pour le sommet de la terre Rio + 20 en mai 2012.

Je pense que cette confusion était nécessaire et même salutaire. Pendant cette dernière séance le FMSD s’est rapproché de l’idéal du forum social mondial décrit le lendemain par Chico Whitaker : la confusion amène la créativité. Discuter à bâtons rompus, échanger des expériences et nourrir les réflexions sont des activités qui ne génèrent pas automatiquement de fortes tensions. En revanche, une fois que les enjeux sont là et qu’il faut projeter des actions concrètes, les divergences se font sentir et apparaissent au grand jour. C’est alors qu’il y a un effort à faire pour converger.

Ce qui a été fait pendant ces deux jours reste un bel accomplissement pour la deuxième organisation d’un forum mondial. Il y avait près de 300 participants venant d’Inde, du Brésil, d’Australie, des Etats-Unis, de France, d’Italie et bien sûr de très nombreux pays africains. Le forum de Belem avait montré que le débat entre activistes et scientifiques était possible. Cette deuxième édition a montré à de nombreuses organisations présentes ou non que ce forum était un lieu de débat légitime qui pouvait produire des actions concrètes. Reste à préparer ces actions et à augmenter encore le niveau de mobilisation pour Rio + 20 et la prochaine édition du Forum Mondial Science et Démocratie

Fabien Nicolas et Théo Delpont-Ramat.

Temps de lecture : 3 minutes
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