La Faute sur Mer: la condamnation du maire est largement méritée!

Claude-Marie Vadrot  • 12 décembre 2014
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Bien que n’ayant pas coutume de me réjouir de l’emprisonnement de mes concitoyens, je ne peux qu’être profondément satisfait du verdict du tribunal qui a infligé quatre ans de prison ferme à l’ancien de la Faute sur Mer pour avoir laissé construire n’importe comment et n’importe où sur des terrains submersibles parfaitement répertoriés. Avec tous les morts que l’on sait. Mais, que l’on se rassure, il n’a pas été arrêté à l’audience. Pas d’embastillement immédiat comme pour un vulgaire voleur de poules ou un piqueur de téléphone portable. Il y aura appel, cassation et autres recours jusqu’à ce que la justice et l’opinion publique oublient que cet élu (comme beaucoup d’autres) a fait n’importe quoi avec les pouvoirs que lui ont imprudemment octroyés les différentes lois de décentralisation. A commencer par celui d’accepter ou de refuser les permis de construire. Ce qui permet aux élus locaux de faire plaisir sans complexe et sans nulle honte à leurs électeurs en oubliant les dangers parfaitement identifiés et répertoriés. Autrefois, quand le permis était refusé, un maire pouvait en rejeter la faute sur les services de la Préfecture auprès de son administré. Maintenant le maire est face à son client, pardon, à son électeur, sans que nulle démocratie locale ne puisse s’opposer à lui pour contester ses décisions.

La décentralisation est une catastrophe dans la mesure où elle permet à de nombreux élus régionaux ou locaux d’entretenir des clientèles plutôt, de droite ou de gauche, que de gérer et de respecter des territoires. Il suffit d’examiner les conséquences des dernières intempéries dans le Sud de la France pour constater à quel point ces élus locaux laissent faire n’importe quoi pour faire plaisir à leurs « électeurs-clients » ; ou aux « entreprises-clientes » qui s’offrent à bon compte des espaces inondables. Il suffit ensuite de pleurer sur des « catastrophe (dites) naturelles ». Les « faiblesses » de ces maires à respecter la loi ou la prudence, à mettre en place des zones à risques, à obéir aux prescriptions de la loi littoral, à la loi montagne, aux protections dans les réserves naturelles ou les parcs nationaux, peuvent se constater sur des milliers de communes françaises. Pas seulement dans la Var, les Bouches du Rhône, les Alpes Maritimes, les Pyrénées Orientales ou la Corse. Trop de maires sont devenus des gestionnaires peureux de leur popularité.

Dans un pays de 60 millions d’habitants répartis sur 550 000 kilomètres carrés, la décentralisation est à la fois un danger et une incitation à la délinquance politique ordinaire. Ces lois permettent aux élus locaux, départementaux et régionaux de se constituer des fiefs de clients et d’obligés. C’est le retour, des Chevaliers, des Marquis, des Comtes, des Vicomtes, des Duc, des Barons, des Princes et autres Margraves se taillant des territoires dans le manteau électoral. Tandis que l’Etat se débarrasse de ses pouvoirs régaliens et que les parlementaires censés gérer le pays ne sont plus que les représentants de commerce de leurs circonscriptions.

Et il n’est par certain que le verdict suffise à ramener les élus à la raison et à inciter les pouvoirs publics à ne plus déléguer leurs responsabilités. Mais c’est au moins un sérieux avertissement !

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