Circulation alternée à Paris: quand les médias contestent la décision et donnent des conseils pour la contourner

Claude-Marie Vadrot  • 22 mars 2015
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Les principaux médias français, à commencer par les chaine d’info et les chaines publiques, ont transformé la décision de mettre en place ce lundi une circulation alternée dans la capitale et dans la région, en une sorte de partie de cache-cache pervers proposée aux automobilistes. Avec incitation à contourner une décision, trop tardive, de salubrité publique. Comme s’il s’agissait d’un jeu plus ou moins pervers et non pas d’une nécessité pour préserver (bien brièvement) la santé des Franciliens. Pas seulement les enfants, les personnes âgées ou les citadins et les ruraux qui sont de santé fragile, mais tous ceux qui, en ce mois de mars, comme auparavant, peuvent être affectés par la mauvaise qualité de l’air qu’ils respirent. Et en meurent prématurément. Sans vergogne, ces journalistes de l’accessoire ont égrené et proposé les astuces pour éviter les contraintes liées à une situation catastrophique: louer une voiture arborant une plaque avec un numéro pair, prendre sa seconde voiture, en emprunter une à ses voisins, organiser un covoiturage d’un jour, etc. Sans oublier de préciser, mine de rien, que les contrevenants n’encourent, s’ils n’avaient vraiment pas de chance, qu’une amende de 22 euros. Sans oublier de minimiser au passage, la dernière opération de ce type et de laisser entendre que lundi, l’air serait peut-être un peu moins nocif. Comme si ces hérauts et vedettes médiatiques redoutaient d’être contraints de renoncer à leur voiture sacrée, d’enfourcher une bicyclette ou (quelle horreur !) d’emprunter les transports publics. Sans trop insister sur le caractère bien tardif de la décision (non pas du préfet comme ils expliquent) de Ségolène Royal et du gouvernement pour raison électorale. Il est hélas bien connu en France que le sort de la nature et de l’environnement est toujours subordonné aux menaces électorales. Pour les animaux sauvages, loups, ours, lynx et beaucoup d’autres, pour la qualité de notre environnement, il y a toujours une élection pour justifier un recul ou des atermoiements.

Quant à la mesure consistant à offrir l’accès gratuit aux transports publics aux Franciliens, elle relève simplement de la démagogie inutile puisque la majorité d’entre eux sont équipés d’un pass Navigo. Donc, pas d’économie possible. Les pouvoirs publics ont donc cédé aux lobbies de la voiture à tout prix, censée compenser l’insuffisance et les mauvais fonctionnements d’une part des transports ferroviaires, des métros et des autobus. Au cœur de se groupe de pression, l’association fantôme « 40 millions d’automobilistes » (un chiffre d’ailleurs mensonger) qui accapare la parole dés qu’il est question de remettre en cause le transport individuel. Ils se manifestent à chaque fois qu’il est question de reculer sur la construction d’une autoroute, de réduire la vitesse sur le périphérique ou dans les rues de la capitale. Ils sont également vent debout contre la multiplication des pistes cyclables, les voies réservées aux autobus, prédisant à tout bout de champs de monstrueux embouteillages qui n’existent ensuite que dans leur imagination de drogués à la bagnole. Cette association est dirigée par un certain Daniel Quéro, issu de HEC et de l’Automobile Club, autre association bien connue pour ses positions réactionnaires grâce au soutien que lui apportent les constructeurs de voiture. Elle proteste en général contre la multiplication des radars, toute nouvelle limitation des vitesses autorisées et vient d’ailleurs de contester vigoureusement le recours à la circulation alternée sans le moindre argument. Par contre, elle n’est pas le moins du monde gênée quand le gouvernement envisage de supprimer des milliers d’arbres le long des routes.

Pour ce qui concerne les industriels et l’agriculture intensive dont le bilan de pollution reste largement supérieur à celui du transport individuel été solitaire, le pouvoir « conseille » simplement de limiter l’émanation des particules fines et des dérivés azotés. Il s’agit bien d’un « conseil » dont nul ne vérifiera qu’il est suivi. Pas plus que ne sont surveillées et contrôlées les demandes de limitations de vitesse sur les autoroutes et le périphérique parisien (et les autres) lors des épisodes de pollution.

Enfin, les allusions des experts politiques appelés à commenter une situation que, par solidarité de conscience, qui minorent les dangers et font allusion à la conférence sur le climat, elles sont tout simplement stupides car il ne s’agit absolument pas de la même problématique…

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