Hulot n’a pas démissionné , il a été sciemment poussé dehors

Il avait raison d’essayer, il a été courageux de partir

Claude-Marie Vadrot  • 28 août 2018
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En quittant ses fonctions parce qu’il était en train de se rendre compte qui allait devoir mentir aux deux journalistes de France Inter qui l’interrogeaient et trouvait cela insupportable, Nicolas Hulot a rappelé à ceux qui l’avaient oublié, qu’il n’était pas un homme politique et que leur longue fréquentation, bien avant Macron, ne l’avait pas transformé. Militant il était, militant il est resté malgré les embuches et les mensonges qu’il a du accepter depuis son entrée au gouvernement. Il sort de cette période blessé mais pas vaincu. Au contraire puisque jusqu’au dernier moment il n’a pas respecté les codes imposés par la participation à un gouvernement.

Il avait raison d’avoir accepté de tenter l’aventure comme il a eu raison d’y mettre lui-même fin. Autour de lui, du Premier ministre au Président en passant par le ministre de l’Agriculture il n’y avait en fin de compte que des écolos en peau de lapin ; des politiques essentiellement soucieux, de profiter de sa réputation tout en soignant comme d’autres présidents, les mêmes clientèles et les mêmes maitres économiques et industriels. Un éternel recommencement de l’histoire des ministres de l’Ecologie ou de la protection de la nature. Je me souviens encore du premier d’entre eux, Robert Poujade, m’expliquant à l’occasion d’une dernière interview en 1974 (il avait été nomme en janvier 1972) qu’il venait d’être viré du nouveau gouvernement car il avait eu l’imprudence de s’en prendre à l’industrie papetière à l’une des activités les plus polluantes en France. D’ailleurs, il faut relire le livre que ce ministre de droite a publié en 1975, « Le ministère de l’impossible ».

Dans cet ouvrage le ministre expliquait comment les administrations et les groupes de pression s’opposaient à ses lois, règlements et décisions. Il ne fut pas le seul à choisir de partir ou être chassé pour avoir oser dénoncer les dérives productivistes de gouvernements de gauche ou de droite. Le personnel politique français est indécrottable dans ce domaine. Dés qu’un ministre de l’environnement est nommé, comme me l’a montré une expérience auprès d’Huguette Bouchardeau puis de Brice Lalonde, les représentants des lobbies font la queue dans les couloirs du ministère, les chasseurs, la FNSEA et les constructeurs de bagnoles en tête…

Donc Hulot a bien fait de jeter l’éponge avec courage et panache. D’autant plus qu’il a rappelé, qu’hélas, il n’existe pas dans la population français de mouvement d’opinion publique pour le soutenir et dont la majorité demande aux « autres » d’avoir un comportement écologiquement responsable. C’est aussi cela qui est tragique plus que le départ tonitruant d’un homme qui aura au moins le mérite d’avoir montré et souligné le mépris de Macron et de la majorité des députés qui le souviennent pour tout ce qui touche à l’environnement.

Gardiens de leurs niches de confort et de destructions, les Français regardent ailleurs et ne se mobilisent que contre le passage de la vitesse sur route à 80 kilomètres/heure. La maison ne brule pas comme Hulot le fit dire à Chirac en 2002 au sommet de la terre, elle est déjà cramée depuis des années….

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