Les impromptus du quotidien

Musicienne, chanteuse, auteure et pédagogue, Nellyla invente son métier avec la patience féconde de celles et ceux qui suivent leur voie.

Lorraine Soliman  • 26 juin 2018 abonné·es
Les impromptus du quotidien
© photo : Pierrick Guidou

Nelly Lavergne, Nellyla tout simplement, trace sa route au gré du temps qui passe. Née au tournant des années 1980 dans une famille où le chant est omniprésent, c’est au piano classique qu’elle se frotte en premier, avant de passer par le jazz pour, ensuite, emprunter d’autres voies, puis s’en émanciper. En suivant un fil rouge, ou plutôt deux, qui s’entremêlent voluptueusement : l’improvisation et l’oralité.

La découverte de l’ethno­musicologie à l’université ouvre à la jeune femme un horizon qui lui va bien, mais qu’elle exploite sur ses terrains à elle, le studio et la scène. Sa rencontre avec ­l’ensemble vocal Soli-Tutti, au milieu des années 2000, comble ses attentes d’alors et d’au-delà : « Croiser les répertoires traditionnels et contemporains, la musique écrite et des musiques plus populaires du monde entier. » Un mélange des genres qui l’amène à reconsidérer sa voix, pour aller vers davantage de techniques liées au chant ­lyrique. Sans perdre de vue le fil de l’improvisation, qui fait le lien dans cette période éclectique.

Tsala, le quartet fondé par Nellyla avec le pianiste Stéphane Tsapis en 2004, répond à une triple intention : jazz, poésie et voyage. C’est l’époque « vocaliste », où elle « [s]’invente un langage à partir d’onomatopées » improvisées sur des compositions écrites. Et puis arrive Jône, le « duo pop électro, mélancolique et décalé » qu’elle forme avec son compagnon, Johan Guidou, batteur devenu « music maker » (définition sur johanguidou.com).

Nous sommes en 2008. Un disque autoproduit marque le début d’une aventure définitivement pluridimensionnelle. L’éclosion est toute proche. « Poésie par-ci, par-là/Dans la bouche et sur les doigts… », Nellyla naît là. Seule (mais bien entourée), elle part sur des terres familières, en Vendée, et s’empare des haïkus de son grand-père pour les mettre en musique : « J’ai toujours adoré faire de courtes chansons en cadeau pour mon entourage, pour les naissances, annoncer un concert… C’est dans cette logique que j’ai choisi le haïku : un format court qui répond à un moment et devient obsolète quand l’événement est passé. »

Nellyla s’amuse avec les mots, les siens et ceux des autres. Avec son indispensable boucleur, ses percussions, son clavier et son ukulélé, les pieds sur terre et le cœur en fleur, elle invente une poésie de l’impromptue quotidienneté, lancée comme un défi à l’ordinaire. Appels d’air, jeux de mots et de textures sonores, ses chansons œuvrent du plus intime au plus universel. « C’est très global, très plastique, ce que j’ai dans la tête », précise-t-elle quand on évoque les Jingle Nell’s, ces tout petits formats audio-vidéo « bricolés avec un téléphone », pointant leur nez comme autant d’instantanés identitaires : « Flocon imprévu », « Mets la gomme », « Au petit théâtre du bonheur », « Un ¾ à l’école »… Autant d’hymnes à la vie qui s’écoule, rêveuse et réelle, sensorielle. Et aujourd’hui « L’Élan », une chanson tout en délicatesse écrite pour l’entrée à l’école de son fils (1).

Concerts : 2 juillet, L’Ogresse Théâtre, Paris XXe ; 7-8 juillet, La Chapelle Notre-Dame, Dourdan (91).

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(1) À écouter ici

Musique
Temps de lecture : 3 minutes