Nicolas Hulot a raison d’essayer, le temps presse

Comme Huguette Bouchardeau ou Brice Lalonde face à des pouvoirs qui ne croyaient pas à l’écologie sauf pour gagner des voix il ne devait pas laisser passer la chance d’agir et de s’adresser à l’opinion publique en dépassant les habituelles méfiances des amoureux des taux de croissance

Claude-Marie Vadrot  • 19 mai 2017
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Tout comme j’ai fortement regretté la désertion de Cécile Duflot et de Pascal Canfin, fuyant un gouvernement parce qu’il n’était pas totalement « écolo », je ne peux que me réjouir de l’arrivée dans le pouvoir de Nicolas Hulot. En son temps Brice Lalonde, issu des Amis de la Terre, dut aussi affronter un gouvernement pas très vert mais il en resta de nombreux acquits. Et je ne comprends pas les réactions méprisantes de Jean-Luc Mélenchon dont la planification écologique devra au moins attendre un autre plan quinquennal pour être mise à l’épreuve de la réalité. Comme si seule l’opposition était belle et pure. Hulot a osé. Le risque mérite d’être salué plutôt que moqué.

En effet, est toujours gagnant quand qui tente de faire passer son point de vue et ses choix au sein d’un groupe, même s’il s’agit d’un gouvernement. S’il avait existé en France une énorme volonté politique pour verdir nos choix de société, cela se saurait depuis longtemps. Ni Rocard, ni Mauroy, ni Jospin, ni Bérégovoy, ni Juppé, ni Sarkozy, ni Hollande (etc.) n’avaient la moindre fibre verte. Pourtant il fallait déjà essayer et faire ensuite le compte des avancées plutôt que celui des échecs. Absolus ou relatifs. Et il ne faut guère compter sur les pitoyables débris des Verts empêtrés dans leurs querelles pour impulser un renouveau de la pensée et de l’action écologiques.

Alors, plutôt que de camper dans la protestation et les incantations, il faut toujours tenter une aventure, toujours tenter le coup quand on se voit offrir la possibilité d’écologiser un milieu, fut-il politique. Même lorsque l’on ne réussit pas totalement, il en reste toujours quelque chose : y compris parmi ceux qui « regardent ». Les citoyens et les élus. Même lorsque nos incurables confrères aussi ignares en écologie que beaucoup de politiques, locaux ou nationaux, ne pensent qu’à Notre Dame des Landes ou à la fermeture de Fessenheim en voyant Nicolas prendre un siège de choix au pouvoir. Comme si tant d’autres choses ne devaient pas également changer. Les mêmes confrères attribuant au passage à l’arrivée de Hulot, la baisse des actions d’Edf alors qu’elle se poursuit depuis des mois. C’est aussi idiot que de réclamer au nouveau ministre de décider immédiatement du sort des loups, des blaireaux ou des renards comme le font quelques associations dont la réflexion globale sort rarement de leurs idées qui, bien que judicieuses, sont un peu fixes…

Le travail (et la chance ?) de Nicolas Hulot, ministre d’Etat, c’est de pouvoir imaginer une politique globale, d’impulser une réflexion pouvant déboucher sur des solutions, sur des décisions ou des inflexions. S’il tient le coup face aux productivistes qui l’entourent et ne rêvent que de courbes de croissance, il en restera quelque chose. Sinon, si dans huit mois ou dans quelques années, il doit démissionner, des changements seront lancés. Dans les textes ou dans les têtes.

Nicolas Hulot a donc eu raison d’oser prendre des risques et d’ignorer les imbéciles qui, déjà, sur les réseaux sociaux nous resservent les vieilles rengaines sur les produits Ushuaia dont il toucherait les royalties, sur ses relations avec les entreprises chimiques et pétrolières. Toutes vieilles antiennes véhiculées par des irresponsables ou des plumitifs de la fachosphère…

Comme le disent ses amis, il était risqué, pour la France et pour la planète, d’attendre encore cinq ans ou que les écolos arrivent démocratiquement au pouvoir.

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