« Constituer une force large et diverse »

Pour Pierre Cours-Salies, de « Gauche alternative 2007 », le scrutin de dimanche a permis au mouvement d’acquérir une autonomie.

Clotilde Monteiro  • 14 juin 2007 abonné·es

Quel bilan tirez-vous de ce premier tour des législatives ?

Pierre Cours-Salies : Après l’apogée de Nicolas Sarkozy, il ne pourra y avoir que la descente. Le risque serait que celle-ci soit accompagnée de la reconstitution de la gauche de résignation, avec des personnalités comme Jean-Claude Gayssot ou Paul Quilès [^2]. Il ne faudrait pas qu’on n’ait qu’un seul recours, incarné par ceux qui nous ont mis dans cette panade. Malgré les embûches, le mouvement Gauche alternative 2007 a acquis une autonomie en obtenant le droit au financement politique sans créer de divisions sur le terrain. Alors que beaucoup voulaient nous en empêcher. Nous avons présenté 80 candidats. À leur demande, nous avons accepté qu’une trentaine de circonscriptions soient rattachées à d’autres associations de financement. On a aussi soutenu une cinquantaine de candidats ayant une double appartenance. Certains sont en passe d’être réélus, comme Patrick Braouezec en Seine-Saint-Denis ou Jacqueline Fraysse dans les Hauts-de-Seine. Michel Naudy (PCF unitaire), dans l’Ariège, a obtenu 5,44 % des voix. Par ailleurs, nous-mêmes avons réussi à construire une dizaine de candidatures. Jean-Claude Eyraud, à Gap, a, par exemple, réalisé un score de 9,28 % ; François Simon, à Toulouse, a obtenu 6,61 % des voix ; Yvan Garcia, à Lodève, a fait 6,5 % ; et François Roux, en Lozère, 5,84 %.

Cet ensemble traduit une volonté de sortir de l’ornière. Jean-Claude Eyraud l’a bien exprimé quand il a dit que nous ne pouvions nous contenter d’être mécontents, et que nous devions reconstruire une véritable gauche alternative. Dernière remarque : dans plusieurs endroits, certains disent ne pas avoir été compris et avoir été perçus comme « le candidat de plus », même s’ils ne faisaient pas de polémique autour des autres candidatures. Après les législatives, cet argument qui nous a beaucoup nui ne pourra plus être utilisé.

Quels sont vos objectifs désormais ?

L’objectif est de savoir comment répondre de la façon la plus efficace aux politiques de droite en construisant une alternative. Notre première réponse passe par une gauche alternative et unitaire. Et nous sommes les seuls à porter cette idée. Je tiens à préciser qu’on ne résiste pas de la même façon quand on est résigné à gérer le système d’une organisation et quand on pense qu’un autre monde est possible. Nous pensons que la recherche d’alternatives est nécessaire et qu’elle doit avoir un cadre unitaire. Cette société est riche, il faut donc trouver les moyens de socialiser autrement les richesses. L’une des positions fortes de la campagne Bové, que nous continuons à défendre, est le souci d’une véritable politique de paix et de désarmement. En nous adressant à l’ensemble des mouvements sociaux, y compris les mouvements antiguerre à l’étranger, on peut espérer créer une coalition. Ce thème, parmi d’autres, illustre notre détermination à nous positionner pour une réelle alternative. Voilà le type de réponses à la fois altermondialistes, européennes et locales qu’on pourra construire à l’avenir.

Quels moyens mettez-vous en oeuvre pour recoller les morceaux de la dynamique unitaire ? Une réunion est programmée le week-end du 23 juin, dans la perspective des assises qui se tiendront à l’automne…

Il va nous falloir faire passer l’idée que ceux qui veulent mener des batailles politiques avec nous doivent s’assurer d’une indépendance vis-à-vis de leurs appareils. Notre objectif, c’est la double appartenance, pour constituer une force large et diverse. C’est la condition pour stabiliser les collectifs et faire face aux mauvais coups. Le but n’est pas de construire une organisation politique classique, ni de s’en tenir à un réseau d’interpellation. Il faut que les collectifs soient des lieux d’initiative liant les propositions aux mobilisations.

Nous proposons à toutes les forces qui veulent se réunir de discuter des éléments de l’alternative indispensable à la société. Nous préparons un texte d’appel qui circulera, afin qu’il soit amendé, avant d’être proposé le 23 juin, et nous reprenons contact en ce moment avec toutes les sensibilités.

[^2]: Tous deux comptent parmi les personnalités du PS et du PCF qui ont annoncé, le 4juin, la création du rassemblement Gauche avenir, destiné à redéfinir les valeurs de la gauche.

Politique
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