Chansons sans paroles

Le pianiste Giovanni Mirabassi et le batteur Leon Parker jouent la richesse de mélodies simples.

Denis Constant-Martin  • 6 mars 2008 abonné·es

Depuis qu’il s’est installé en France, en 1992, le pianiste italien Giovanni Mirabassi s’est fait apprécier non seulement comme un excellent accompagnateur mais surtout comme un mélodiste exceptionnel. Dans un univers encombré, celui du piano moderne refondé par Bill Evans, il a montré que l’on pouvait développer toutes les innovations harmoniques des années 1960 sans pour autant cesser de faire chanter l’instrument. Cela n’est pas seulement dû à un supposé «~lyrisme~» italien ; sans doute davantage à une imagination particulièrement féconde chez cet autodidacte ; et, surtout, à la vaste expérience de qui a «~fait le métier~»~: joué toutes sortes de musiques et notamment accompagné des chanteurs.

Les compositions sur son dernier disque sont de véritables chansons sans paroles, reformulées dans des improvisations riches, complexes, sans cesser de posséder cette apparence (mais apparence seulement) de simplicité qui permet de les mémoriser facilement, voire de les siffloter sans y penser.

Il y faut une sorte de magie qui préserve la joliesse de la mièvrerie, qui garde de toute mollesse la souplesse de la phrase. Le batteur Leon Parker joue pour cela un rôle décisif. Rythmicien hors pair, coloriste somptueux, il cisèle l’écrin dans lequel brille la « voix » du piano. Hostile à tout effet inutile, travailleur de l’épure qui, naguère, élagua son instrument jusqu’à n’en garder qu’une cymbale (il est revenu depuis à une batterie plus fournie), il cherche au coeur de la musique nouée entre le piano et la basse de Gianluca Renzi l’essentiel de ce qui doit être mis en valeur. Il ne souligne rien, ne redouble rien : il imagine ce qui peut compléter, ce qui va relever. D’où cette impression d’un bruissement vital et pourtant d’une légèreté à la limite de l’impalpable. Si la terre est furieuse, cette musique n’est pas pour la calmer, mais pour en canaliser l’énergie en une ardeur vitale.

Culture
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