Statistiques manipulées

Xavier Frison  • 24 juillet 2008 abonné·es

L’annonce des expulsions d’étrangers en 2008 par le ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale « témoigne d’un affichage politique dont la réalité est très discutable », estime le collectif national Romeurope. Les retours dits « volontaires », dont la part aurait quadruplé en un an, sont particulièrement visés par les associations du collectif. Selon Romeurope, sur les cinq premiers mois de 2008, plus de 6 000 personnes (soit 40 % des 14 660 reconduites) sont parties dans le cadre de l’aide au retour humanitaire. Parmi celles-ci se trouvent de nombreux Roumains et Bulgares, deux nationalités qui constituaient déjà un quart des éloignements en 2006, avant l’entrée de ces personnes dans l’Union européenne. « Or, on sait qu’il s’agit essentiellement de Roms, dont le dénuement auquel ils se trouvent acculés sert de prétexte pour évacuer les lieux de vie, dans le cadre d’opérations de retour organisées de façon conjointe par la police et l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations », s’indigne le collectif.

Dans la plupart des cas, les demandes d’aide au retour humanitaire « sont obtenues sous la contrainte et ne résultent pas d’un réel projet de retour », estime encore Romeurope, avant de développer les conditions dans lesquelles ces demandes sont signées : contexte de panique délibérément occasionné, menace de prison, absence d’interprète, pas de rétractation possible après confiscation des papiers d’identité et éloignement des observateurs extérieurs. Pour Romeurope, « ces opérations de retour contredisent ce que laisse entendre l’appellation d’“humanitaire” ». Sans parler des sommes distribuées qui, en l’absence d’accompagnement effectif dans le pays d’origine, « n’ont d’autre effet que de susciter de rapides allers-retours […], parfois dans le seul but de bénéficier de ces aides ». Qu’importe, ­
in fine, puisque « même si le nombre des Roms migrants en France est globalement constant, ces reconduites et retours volontaires font s’envoler les statistiques ». Pour Brice Hortefeux, c’est sans doute là l’essentiel.

www.romeurope.org

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