Le poison multiplexe (À flux détendu)

Le projet de multiplexe de Tours-nord (Indre-et-Loire) est empoisonné. Principale victime désignée : les cinémas Studio, un modèle de cinéma d’art et d’essai.

Christophe Kantcheff  • 14 novembre 2013 abonné·es

Les multiplexes continuent à pousser comme des champignons – 33 projets en cours en 2013. Or, nous sommes en période de récolte. Mais gare aux amanites phalloïdes ! Exemple : le projet de multiplexe de Tours-nord (Indre-et-Loire) est, en effet, empoisonné. Principale victime désignée : les cinémas Studio, dont la réputation n’est plus à faire. Un modèle de cinéma d’art et d’essai, exigeant dans sa programmation curieuse de toutes les cinématographies, ouvert à tous les publics et en particulier aux jeunes, avec, en outre, une bibliothèque offrant un vaste fonds de livres sur le septième art. N’est-il pas raisonnable de penser que les films projetés dans le nouveau multiplexe seront très différents de ceux que proposent les Studio ? Erreur. Tours compte déjà deux multiplexes, du groupe CGR. Ce ne sont plus 20 mais 30 écrans qu’il faudra ainsi alimenter. Le futur multiplexe, qui sera géré par le groupe Davoine, pour se distinguer et s’ouvrir des marchés, puisera dans les films art et essai dits « porteurs ». C’est-à-dire la vingtaine de films qui, aujourd’hui, assurent plus d’un tiers des recettes des Studio. Leur existence est donc en jeu. Voilà le poison.

Bien entendu, Davoine agite des rideaux de fumée. Entre autres : la possibilité d’un accord de programmation entre salles concurrentes. Mais de tels accords ne tiennent jamais longtemps, et le plus faible se retrouve à devoir sans cesse faire appel au médiateur du cinéma contre le plus fort. Par ailleurs, les Studio, avec le réseau de cinéma itinérant Ciné Off, au nord de Tours, ont développé un projet alternatif, pour l’instant en vain. Le 15 novembre, la Commission nationale d’aménagement commercial (Cnac) doit se prononcer sur l’implantation du multiplexe Davoine, projet soutenu par la municipalité socialiste. D’autres recours, ensuite, seront possibles. Mais si la Cnac donnait son accord, ce serait un coup de plus porté contre la diversité et la démocratie culturelle.

Culture
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