L’amour en temps de crise

Et si l’amour était le début du regard sur l’autre, le premier groupe, la solidarité suprême, l’absolu compagnonnage ?

Ingrid Merckx  • 22 juillet 2015
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L’amour en temps de crise
© Photo : LES LUMIÈRES DE LA VILLE (1931, Charlie Chaplin, avec Virginia Cherrill et Charlie Chaplin) Il laisse croire à la belle aveugle qu’il est riche… La scène de la rencontre a nécessité 342 prises : comment percevoir la richesse autrement que par la vue dans un film muet ? Photo12.com/Collection Cinema/Photo12/AFP

« La vie, la santé, l’amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ? », dixit … Laurence Parisot, ex-patronne du Medef, pour justifier la généralisation de la précarité. Ce pourrait être l’intitulé d’une épreuve de philo. La précarité, c’est quoi ? La mortalité ? La fragilité ? L’absence de droits ? La désaffiliation lente qui dénoue les liens tissés par une personne jusqu’à ce qu’elle se retrouve, de licenciement en divorce, puis en perte de logement et peut-être en maladie, sur le trottoir, brisée ? Difficile de ne pas penser aux Amants du Pont-Neuf  (1991), où Leos Carax filme les amours de deux vagabonds incarnés par Juliette Binoche et Denis Lavant. À leurs embrassades et à leurs fous rires sur le bitume, à leurs bleus et à leurs bosses, depuis le centre d’hébergement d’urgence de Nanterre jusqu’aux bords de Seine, où ils se réfugient. « Dans un contexte macrosocial où les identités sociales et professionnelles sont flottantes, l’homme et la femme cherchent à se construire dans un espace-refuge, à l’abri des regards indiscrets », écrit le philosophe Gilles Lipovetsky dans le Crépuscule du devoir (1992). Et si l’amour était le début du regard sur l’autre, le premier groupe, la solidarité suprême, l’absolu compagnonnage ? Pour les Amants du Pont-Neuf, les Rita Mitsouko ont écrit une chanson qui dit : « Les amants le font de cœur/Parce que l’union fait la force/Et leurs traits s’unifieront/Jusqu’à se ressembler/Pour le pire et le meilleur/Jusqu’à y crever leurs forces/Ils marchent sans sourciller/D’un pas irrégulier.  »

Publié dans le dossier
L'Amour au temps du libéralisme
Temps de lecture : 1 minute
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