État d’urgence : quelle pertinence ?

Décrété après les attentats du 13 novembre, l’état d’urgence, a été prolongé le 26 novembre pour une durée de trois mois. Si l’intention de cette mesure d’exception était de prévenir tout acte de terrorisme, qu’en est-il réellement ? Le bilan, chiffré, interroge notamment la pertinence du projet gouvernemental visant à inscrire l’état d’urgence dans la Constitution, qui ne prévoit que l’état de siège.
Lire > Les projets de l’exécutif pour rendre permanent l’état d’exception
Si l’état d’urgence a permis de multiplier les perquisitions administratives, hors de toute procédure judiciaire, une minorité seulement a donné lieu à des interpellations. Depuis le 14 novembre, plus de 2.764 perquisitions administratives ont été menés, menant à seulement à 294 gardes à vue.
De même, plus de 368 personnes ont été assignées à résidence par le ministère de l’intérieur. Parmi elles, des militants écologistes assignés ont témoigné de leur incompréhension et se sont interrogés sur la nécessité à bâillonner la société civile en pleine COP 21.
Loin de se concentrer sur la lutte contre le terrorisme, ces mesures ont ratissé trop large pour certains, conduisant à des perquisitions et assignations abusives.
Lire > Des militants écologistes assignés à résidence
Le Défenseur des droits Jacques Toubon s’est ému , ce matin sur France 2, d’ «un certain nombre de dérives» :
«A la fois par les réclamations que je reçois, et par le travail qui est fait par l’Assemblée nationale et le Sénat, il y a un certain nombre de dérives, ou plutôt d’approximations. (…) Les mesures qui ont été prises, perquisitions administratives, assignations à résidence, ont été prises un peu larges.»
Pour cet ancien ministre de la Justice, «aujourd’hui, la loi a prévu des restrictions de liberté. Mais (…) au fur et à mesure, on va s’apercevoir qu’il y a un certain nombre de cas dans lesquels les mesures qui ont été prises ont été excessives» .
M. Toubon a par ailleurs qualifié l’inscription de l’état d’urgence dans la Constitution comme «grosse de danger» si y sont inscrites «des dispositions qui permettraient d’introduire ensuite des mesures plus restrictives pour les libertés» .
Saisis par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) par l’un des 26 militants assignés à résidence, les Sages vont examiner dans la journée la conformité de ces mesures. Si le Conseil constitutionnel devait prononcer ces assignations non conformes au texte fondamental, les opposants à la réforme constitutionnelle – proposée mercredi au Conseil des ministres – pourraient faire valoir, selon l’avocat Patrice Spinosi, qui représente la Ligue des droits de l’Homme (LDH), que «la loi a été trop loin et qu’il ne faut pas changer la Constitution pour faire rentrer de force des mesures contraires à des principes essentiels» .
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