« Partir un jour », d’Amélie Bonnin (Hors compétition)

Le premier long métrage d’Amélie Bonnin a fait l’ouverture du festival de Cannes.

Christophe Kantcheff  • 13 mai 2025
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« Partir un jour », d’Amélie Bonnin (Hors compétition)
La question de la culture populaire est un aspect central de "Partir un jour", Cécile étant une transfuge de classe.
© Topshot Films – Les Films du Worso – Pathé Films – France 3 Cinéma

Partir un jour / Amélie Bonnin / 1h 34.

Dans l’effervescence et tout en découvrant qu’elle est enceinte, Cécile est sur le point de lancer à Paris son restaurant gastronomique. Mais elle apprend que son père a eu une attaque cardiaque. Elle qui néglige ses parents depuis longtemps se décide à aller leur rendre visite, loin de Paris. Voici l’amorce de Partir un jour, le premier long métrage d’Amélie Bonnin dont Thierry Frémaux a décidé de faire le film d’ouverture (hors compétition) de la soixante-dix-huitième édition du festival de Cannes – c’est la première fois qu’une première œuvre fait l’ouverture.

Pari osé, sans doute dans la même perspective de l’an dernier avec Le Deuxième acte de Quentin Dupieux, c’est-à-dire afficher pour commencer un esprit de légèreté. Il est vrai que Partir un jour a l’avantage d’être rafraîchissant avec sa forme de comédie musicale, dont toutes les chansons sont des succès populaires des années 1960 à 1980 mais revisités, du « Loir-et-Cher », de Michel Delpech, à « Cette année-là », de Claude François (ici, transformé en « Ces soirées-là » à la manière du rappeur Yannick).

Juliette Armanet convainc dans le rôle de Cécile et apporte sa voix subtile face à des comédiens (Bastien Bouillon, Dominique Blanc, François Rollin…) moins assurés dans le chant. Mais le contraste est plus touchant que problématique – le moment où François Rollin interprète « Cécile, ma fille » est l’un des plus émouvants.

Transfuge de classe

Cette question de la culture populaire est un aspect central de Partir un jour. Cécile est une transfuge de classe. Elle est passée du restaurant routier que tiennent ses parents où elle a grandi (décor principal du film) à l’élaboration d’une cuisine distinguée via… « Top chef ». Quel héritage Cécile a-t-elle gardé de ses origines ? Dans quelle mesure l’a-t-elle trahi ? Son père a consigné dans un carnet toutes les phrases qu’elle a prononcées pour renier son milieu dans l’émission. A-t-elle obéi à un « passage obligé » pour accéder à une classe sociale plus élevée ?

Cependant la gravité fait place à l’humour et à la fantaisie des souvenirs de jeunesse, Cécile retrouvant un amour d’antan (Bastien Bouillon) dont le charme agit encore sur elle. Le film n’est pas dénué de défauts, concernant la mise en scène et surtout le scénario – par exemple, le personnage du compagnon de Cécile (Tewfik Jallab) est relativement sacrifié. Mais il témoigne d’une vraie personnalité. Amélie Bonnin a aussi réussi à transformer ce qui était un court métrage (au titre éponyme, visible actuellement sur Arte.fr) en long. Cette mue difficile, débouchant souvent sur un film dilué, donne ici une œuvre totalement renouvelée. Chapeau !

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Cinéma
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