Rwanda : de la nécessité de ne pas écrire trop vite

Denis Sieffert  • 31 janvier 2012
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Certains lecteurs ont relevé la tonalité différente — pour ne pas dire la contradiction — entre mon blog sur le Rwanda, écrit le 12 janvier, et un article paru sous ma signature dans Politis, le 19 du même mois. Le sujet en était, évidemment, la parution du fameux rapport d’experts sur l’attentat qui, le 6 avril 1994, a coûté la vie au président rwandais Habyarimana. On sait que cet assassinat déclencha, directement ou indirectement, le génocide qui a fait huit cent mille victimes principalement parmi les tutsis, mais aussi parmi les hutus modérés. Mon blog a été écrit après lecture des articles de Libération et du Monde, et sur la foi de ce que déduisaient ces titres dudit rapport. Libération, on s’en souvient, voyait dans le rapport une vérité irréfutable. La Une était barrée d’un énorme «Irréfutable» . Le Monde titrait «Une vérité qui dérange la France». Quelques jours pour obtenir le précieux document et tout autant pour le lire. Et patatras ! Le rapport, dont je confirme qu’il n’est pas en cause, ne dit rien de ce qu’on s’est empressé de lui faire dire, et de ce qu’on a fait circuler dans la presse. Puis, peu à peu, des réactions ont été publiées qui contredisaient cette première lecture faite par Libé et le Monde. Rony Brauman, Claudine Vidal et Jean Hervé Bradol ont publié dans Marianne une tribune sous le titre «Les idiots utiles de Kagamé» (le 28 janvier). Bradol avait d’ailleurs été le premier à réagir (je l’avais cité dans Politis du 19 janvier), et maintenant Philip Reyntjens, professeur à l’université d’Anvers, et l’un de ceux qui ont sans doute le plus travaillé sur le sujet, qui publie un texte très intéressant sur le site lemonde.fr. C’est assez, à mes yeux, pour que l’on reprenne ses distances avec ce déferlement de propagande qui fait dire au rapport ce qu’il ne dit pas. J’y reviendrai prochainement, évidemment, en donnant dans Politis, comme nous l’avons déjà fait, la parole aux uns et aux autres.

Temps de lecture : 2 minutes
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