COP 24 : une conférence pour rien qui est peut-être la dernière

Des délégués fatigués, des ONG aphones et des chefs d’Etat absents, une conférence réunie à Katowice mais aucun résultats pour la planète.

Claude-Marie Vadrot  • 17 décembre 2018
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COP 24 : une conférence pour rien qui est peut-être la dernière
photo : photo : BEATA ZAWRZEL / NURPHOTO

Quelle que soit l’issue du marathon en cours et de la prolongation des débat en cours pour trouver un samedi, les travaux de la COP 24 organisés en Pologne resteront parmi les plus catastrophiques de l’histoire des tentatives pour développer les luttes et des outils contre le dérèglement climatique. Dans les allées de la conférence, malgré les réunions d’urgence organisées cette dernière nuit, plus personne ne croit que cette conférence aura servi à quelque chose. D’ailleurs, il semble évident que ni les experts, ni les ONG, ni les diplomates n’y ont jamais cru, présents sous l’effet d’une simple routine. Aucun des chefs d’Etat et de gouvernement du G20 n’ont même jugé utile de faire même un bref acte de présence. Jeudi, le ministre français de la Transition écologique, François de Rugy, faisait encore de la figuration à Paris dans les débats sur la motion de censure que tous les politiques savaient mathématiquement vouée à l’échec. Quant à l’ex-champion français de l’écologie, Emmanuel Macron, il a fait une impasse définitive sur ses engagements. Avec le retrait dans l’indifférence de la France et des pays riches, ni les objectifs financiers, ni la mise en oeuvre des décisions de l’Accord de Paris ni l’exigence d’une plus grande justice climatique seront atteints ni même approchés.

Grande lassitude

En fait, à en croire les confidences des diplomates français, ni la France ni les grands pollueurs de la planète ne souhaitaient être dénoncés publiquement pour ne pas avoir respecté les engagements pris à la COP 21, même si ces engagements célébrés en 2015 par Laurent Fabius et François Hollande n’avaient rien de coercitifs. D’ailleurs, contrairement à l’hypocrisie qui a été de rigueur au cours de nombreuses conférences du passé, il n’y a eu aucune bataille de dernière minute sur les parenthèses, sur les temps de conjugaisons et sur les virgules. Juste sur les chiffres des aides à la reconversion des pays du sud et sur les nouveaux reports de délais pour agir. Comme si l’urgence n’était pas de mettre un terme au réchauffement pour toute la planète. Comme si la majorité des diplomates présent ignorait la catastrophe en cours était ignorée.

Ces joutes sur les modalités d’un accord (applications de l’accord de Paris) ont évidemment été parasitées, par la curieuse et redoutable entente entre les Etats-Unis, le Koweït, l’Arabie saoudite, le Brésil et la Russie. Avec un acharnement à sortir des discussions le dernier rapport du Giec ; et à glorifier les énergies fossiles. Une démarche soutenue en coulisse par le président polonais et son ministre de l’Environnement, soucieux de faire admettre que le charbon de leur pays était « propre ». Le premier a déclaré que la Pologne avait 200 ans de réserve de charbon et comptait bien l’utiliser ; et le second a expliqué sans rire que la pollution de l’air du pays était essentiellement due au pourrissement de nombreux arbres du massif forestier primaire de Bialowieza. Un « hommage » rendu à tous les groupes charbonniers et énergétique qui sponsorisaient de nombreux espaces de la conférence.

Des ONG découragées

Si les diplomates sont apparus encore plus usés et sceptiques qu’à l’ordinaire, comme si leur théâtre ne les amusait plus, les associations ont plus que jamais été les « idiots utiles » de cette conférence climat, comme si elles se demandaient ce qu’elles faisaient là, se contentant trop souvent de pétitions de principe. D’ailleurs, elles étaient à la fois peu nombreuses et peu présentes. Comme si, laminée par le mimétisme avec les délégations officielles, la société civile s’avouait de moins en moins capable de peser sur les non-décisions de la « communauté internationale », résignée, à la grande fureur des pays du Sud, à lutter efficacement contre le dérèglement climatique ; notamment les 48 nations les plus fragiles. Ce n’est pas un hasard mais un signe que la marche pour le climat de Katowice n’a réuni que 3000 personnes.

Comme le Brésil a refusé d’accueillir une COP 25 en 2019, l’existence même des conférences climat parait remise en cause, même si une nouvelle réunion a été programmée au Chili. Les trois interventions, non prévues, du Secrétaire Général des Nations Unies n’auront pas servie à grands choses pour inciter les pays pollueurs à réagir et agir…

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