« Affirmer le droit des Palestiniens à l’Histoire »

Bernard Ravenel, président de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, présente ici
les principaux objectifs
de la journée
du 17 mai en faveur d’un État palestinien.

Denis Sieffert  • 15 mai 2008 abonné·es

Comment la Plateforme a-t-elle construit son initiative du 17 mai ?

Bernard Ravenel : Finalement, après un démarrage difficile, nous sommes parvenus à monter une initiative qui peut être importante pour l’avenir du mouvement de solidarité avec la Palestine en France. À travers cette préparation, nous avons constaté des phénomènes assez contradictoires, tous significatifs.
D’abord, notre initiative décentralisée du 29 mars lancée pour la « journée de la terre » – plantation d’un olivier dans un lieu public – a suscité une réelle mobilisation, en particulier d’élus locaux. Ce phénomène, inédit, a touché plus de 50 villes et nous a beaucoup encouragés.
Ensuite, la mobilisation pour le 17 mai a été inégale. Et puis, le programme enfin arrêté, il y a eu la mobilisation militante, des articles dans la presse, des émissions de radio et aussi le soutien de grandes organisations non membres de la Plateforme comme des syndicats (CGT, FSU, Unef) ou le Secours islamique. Outre le soutien de nombreuses personnalités du monde de la culture, il faut noter celui de personnalités politiques. Jamais nous n’avons eu autant de parlementaires à nos côtés. La majorité des membres socialistes de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale nous ont apporté leur soutien. Le président du conseil régional d’Île-de-France, Jean-Paul Huchon, sera officiellement représenté par la conseillère régionale Lysiane Alezard. Sans oublier le soutien de centaines d’élus locaux grâce, en particulier, à l’appel de Claude Nicolet, animateur du Réseau de coopération décentralisée avec la Palestine (RCDP).

Quels sont vos objectifs ?

Nous voulons montrer que nous pouvons réunir du monde sur l’exigence du droit, et en particulier du droit du peuple palestinien à disposer en pleine souveraineté d’un État tel que fixé par le droit international. N’oublions pas que nous commémorons les 60 ans de la Nakba , la catastrophe palestinienne, longtemps niée. Il s’agit donc d’affirmer le droit des Palestiniens à l’histoire, et de faire apparaître la vérité historique, c’est-à-dire la responsabilité centrale du mouvement sioniste et d’Israël dans l’expulsion de la majorité des Palestiniens de leur pays en 1947 et en 1948, faisant de ce peuple un peuple de réfugiés. Et il n’y aura pas de solution à la question nationale palestinienne tant qu’Israël ne reconnaîtra pas sa responsabilité historique dans cette tragédie nationale. Tel est le sens du débat historique.
Un deuxième débat portera logiquement sur le « que faire ? » pour que le droit international soit enfin appliqué après soixante ans de déni et de dépossession continue. Il sera axé sur la centralité des responsabilités de l’Europe. L’Europe continue imperturbablement de traiter Israël comme un pays au-dessus du droit sans dire un mot de condamnation pour ses crimes de guerre. Après la faillite annoncée d’Annapolis – et donc des États-Unis – et le dangereux vide diplomatique qui va s’ouvrir, l’Europe est dans l’obligation de stopper enfin la stratégie israélienne du fait accompli, d’imposer à Israël un cessez-le-feu et de demander une conférence internationale sur le Moyen-Orient comprenant toutes les parties du conflit pour obtenir l’application rigoureuse de toutes les résolutions du Conseil de sécurité qui concernent la Palestine. Ce qui nécessite – et toute l’histoire des négociations israélo-arabes le démontre – une politique de pressions-sanctions au niveau diplomatique, politique et économique, pour obliger Israël à négocier sérieusement et à respecter le droit.

Craignez-vous une guerre régionale ?

Nous assistons déjà à un saut qualitatif dans les opérations, mais aussi dans les préparatifs militaires d’Israël, en liaison bien sûr avec les États-Unis. Les racines de cette escalade sont à chercher dans la décision des gouvernements de Washington et de Tel-Aviv de ne pas discuter avec le Hamas. Et l’Europe a suivi cette décision ! Le 17 mai, nous insisterons sur la nécessité du dialogue si l’on veut éviter d’entretenir une logique de guerre.
Jamais, depuis la Seconde Guerre mondiale, la situation régionale n’a été aussi explosive, et tout cela du fait de la non-résolution de la question palestinienne. La paix par le droit ou ce sera la guerre, tel est le message que nous voudrions faire passer le 17 mai.

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