Un congrès très tendu

Les « communistes unitaires » et d’anciens proches de Robert Hue déplorent le peu d’évolution de leur parti et dénoncent l’exclusion des cercles dirigeants qui les menace.

Michel Soudais  • 11 décembre 2008 abonné·es

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Le 34e Congrès du PCF s’ouvre ce jeudi dans un climat qui n’a rien d’apaisé. Entre ceux qui accusent Marie-George Buffet et ses proches d’opérer une « purge » et ceux qui leur reprochent de « liquider » le communisme, les débats promettent d’être agités dans le quartier d’affaires de La Défense (Hauts-de-Seine). Même l’Humanité relève que la préparation de ce congrès « a donné lieu à quelques excès de langage » et que « le renouvellement de sa direction collective ne semble pas aller de soi » .
Après son score calamiteux à la présidentielle de 2007 (1,93 %), le plus faible de l’histoire du PCF, Marie-George Buffet avait, à plusieurs reprises, exprimé son souhait de « se retirer », jugeant nécessaire un renouvellement à la tête du PCF. Depuis l’été, elle était progressivement revenue sur ses déclarations. Le 1er décembre, devant la « commission de transparence sur les candidatures », elle a proposé d’animer avec Pierre Laurent une direction collégiale de « 6, 8 ou 10 responsables » avant de se retirer ultérieurement, probablement au cours d’un futur congrès intermédiaire : « Je ne souhaite pas refaire un mandat entier, mais, en tant que secrétaire nationale, de passer simplement le gué avec la nouvelle équipe. »
Ce maintien et le choix de Pierre Laurent pour lui succéder manifestent davantage de continuité que de changement. Fils de Paul Laurent, ancien dirigeant du PCF, proche de Georges Marchais et frère de Michel Laurent, membre de la direction du Parti, Pierre Laurent, entré à l’Humanité en 1985 comme journaliste économique, dirige à 51 ans la rédaction du quotidien communiste depuis huit ans.

Illustration - Un congrès très tendu


Marie-Goerge Buffet manifeste aux côtés des salariés du public et des enseignants le 8 janvier 2008.
De Sakutin/AFP

Mais c’est une autre décision de cette commission qui a mis le feu au Parti. À la même réunion, a en effet été présentée une liste de 152 candidats au conseil national, excluant un bon nombre de ses 240 membres actuels. Une « purge terrible » est en cours, a déploré l’ancien ministre Jean-Claude Gayssot, « du jamais vu dans notre histoire contemporaine » , mais « du déjà vu à l’Est ».
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Si les « communistes unitaires », parmi eux Patrick Braouezec, Roger Martelli ou Pierre Zarka, sont les principales victimes de ce dégraissage et évoquent, eux aussi, dans un communiqué, *« une purge à l’encontre de tous ceux qui, au sein du conseil national, ont défendu l’idée que le parti communiste doit être partie prenante d’un processus de création d’une force unifiant les différents mouvements qui constituent la gauche du PS »
, ils ne sont pas les seuls à en faire les frais. D’anciens proches de Robert Hue, visés eux aussi, se sont joints, le 5 décembre, à la « conférence de presse des virés » organisée pour tirer la sonnette d’alarme.

« Il existe un grand danger de normalisation et de purification idéologique », regrette Dominique Grador, ancienne présidente du conseil national, en appelant le PCF à « s’émanciper de la matrice » qui est la sienne « depuis 1920 » et le conduit à penser que « la diversité est un danger et le péché originel de tous ses échecs ces dernières années ». « Le centre de gravité du PCF se déplace vers quelque chose de raide, sectaire et mortifère », renchérit Pierre Zarka. Tandis que Gilles Alfonsi dénonce la « schizostratégie » de la direction du PCF : « D’un côté, elle défend des listes ouvertes aux européennes ; et de l’autre, elle a une attitude de fermeture et de non-transformation du parti. »
La direction du PCF s’en défend. La liste présentée le 1er décembre n’était « qu’un travail d’étape » , assure Michel Laurent. Marie-George Buffet quant à elle faisait, lundi, le « pari » que le conseil national serait « porteur de la diversité actuelle » du PCF. La veille, sur Canal +, la numéro un communiste avait toutefois paru justifier ces mises à l’écart : « Il y a des camarades qui pensent qu’il faut créer une autre force, c’est leur choix, je le respecte, mais je veux leur faire comprendre que les camarades ne peuvent pas à la fois créer une autre force et espérer diriger le parti communiste français. »
L’allusion vise plus le projet de Fédération de la gauche alternative, dans lequel les « communistes unitaires » sont partie prenante [^2]
, que l’organisation par ces derniers d’un rassemblement « vers la création de la force unitaire de l’autre gauche » , le 13 décembre au soir, à La Défense, à deux pas du lieu du congrès. « Une provocation » violemment fustigée par des groupes orthodoxes qui accusent les organisateurs de chercher à « saborder le congrès » . Ambiance.

[^2]: Après les Alternatifs, l’Association des communistes unitaires et différents mouvements écologistes et altermondialistes regroupés cet été à Miremont, la Coordination nationale des collectifs unitaires a donné son aval au projet lors de sa dernière réunion, les 29 et 30 novembre à Grabels (Hérault), en souhaitant que cette Fédération « reste ouverte et soit un outil pour rassembler largement tous les courants et tous les militants qui veulent une force politique nouvelle ». Elle devrait être officiellement lancée tout prochainement.

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