Coûteux coup de com’

Nicolas Sarkozy envisage de supprimer le bouclier fiscal, mais aussi l’impôt sur la fortune.

Thierry Brun  • 21 octobre 2010 abonné·es

Les symboles fiscaux prennent de l’importance avant la présidentielle de 2012. Il a suffi de la pression amicale de 135 députés de l’UMP (sur 314) pour que l’Élysée annonce la suppression du bouclier fiscal. Cette mesure phare du quinquennat de Nicolas Sarkozy est devenue un symbole « d’injustice », selon le mot de François Baroin, ministre du Budget, mais sa suppression « n’a de sens que si on touche l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) » , a ajouté Jean-François Copé, patron des députés UMP. Nicolas Sarkozy a donc promis pour 2011 une réforme de la fiscalité du patrimoine qui pourrait reprendre la suppression du contesté bouclier, mais aussi celle de l’ISF, un impôt payé par les contribuables dont le patrimoine, déduction faite des exonérations, est supérieur à 790 000 euros.

La fin du bouclier et de l’ISF, destinée à calmer les critiques, y compris à gauche et dans les mouvements sociaux, a depuis longtemps des défenseurs au sein de la droite. Les sénateurs Jean Arthuis, président centriste de la commission des Finances du Sénat, et Philippe Marini, rapporteur général de la commission des Finances, sont les chefs de file de cette proposition de double suppression qui donne avantageusement l’impression d’opérer un virage fiscal à 180 degrés. Les mauvais esprits ont cependant remarqué que cela se traduirait par un allégement massif de l’impôt des plus riches, « avec une explosion des inégalités » , note l’Union Snui-SUD Trésor. En effet, si le bouclier fiscal a coûté 679 millions d’euros à l’État en 2009, l’ISF a rapporté 3,4 milliards la même année. Le supprimer reviendrait à alléger de 2,8 milliards la fiscalité sur la détention de patrimoine.

Même l’hypothèse de l’instauration d’une nouvelle tranche à l’impôt sur le revenu, proposée par la droite, entraînerait un cadeau fiscal conséquent pour les plus riches, variant de 700 millions à 2,5 milliards. « Le point commun à ces hypothèses demeure donc avant tout d’en finir avec l’imposition de la détention de patrimoine ou, à tout le moins, d’en poursuivre le détricotage » , estime le syndicat des impôts, qui souligne qu’aucune des hypothèses soutenues par la droite n’envisage une fiscalité des revenus et du patrimoine « plus juste et plus redistributive » .

Quand on sait que les 10 % des ménages les plus aisés reçoivent les deux tiers des revenus du patrimoine, le coup de com’ de l’Élysée ne satisfera que l’électorat de la droite avant l’échéance présidentielle. La ficelle est si grosse que le chef de l’État a souhaité que le sujet soit traité en catimini dans une loi de finances rectificatives en juin 2011. Et pas avant. Histoire de faire passer la pilule en douceur.

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