Le Front de gauche entre en campagne

Hier soir, Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à la présidentielle, donnait le coup d’envoi d’une campagne qu’il veut « collective » et « unie ». Politis.fr était présent à cette fête parisienne qui a rassemblée plusieurs milliers de personnes.

Pauline Graulle  • 30 juin 2011
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Le Front de gauche entre en campagne

Ambiance détendue autour de la grande scène où La Parisienne Libérée se produit avec perruque vermeille de rigueur… Sous la rangée de chapiteaux, on fait tourner « La roue des grosses fortunes » , on shoote des boîtes de conserve à l’effigie de Sarkozy, Bouteflika ou Guéant dans un « Dégage-tout » pas piqué des vers, on achète des Tshirts rouges bardés du slogan « Qu’ils partagent ou qu’ils dégagent » … L’humour est grinçant, le militantisme joyeux, le fond de l’air, somme toute, plutôt optimiste.

Nous sommes à deux pas du métro Jaurès (Paris XIXe). Evidemment, le choix du lieu ne doit rien au hasard. C’est ici, place Stalingrad, que la bataille du Front de gauche pour la présidentielle est lancée, en ce mercredi 29 juin, dans la lumière rougeoyante d’une soirée d’été. Devant la scène, 6 500 personnes – selon les organisateurs qui parlent d’un « chiffre hallucinant » (sic) –, militants, sympathisants ou simples badauds, qui applaudissent en chœur, hurlent d’enthousiasme ou sifflent copieusement le nom de Christine Lagarde, la toute nouvelle patronne du FMI.

Dans la foule, où l’on compte pléthore de drapeaux siglés « Front de gauche » et même quelques drapeaux français, il y a Nordine, 25 ans, de Saint-Ouen. Un étudiant en Sciences politiques qui s’est engagé au Mouvement des jeunes communistes suite aux « émeutes de banlieue » en 2005, et qui veut pouvoir offrir un « débouché politique aux indignés d’Europe » . Il y a aussi Hicham, jeune syndicaliste Sud-Solidaires de Pizza Hut à Neuilly-sur-Seine. Muni d’une grosse tirelire en carton, il collecte des fonds pour la caisse de solidarité des travailleurs en grève depuis huit semaines. Il y a encore Simon, ancien socialiste de la « motion C » (celle de Benoît Hamon), reconverti aux idées du Front de gauche – « un bon bol d’oxygène » – et qui trouve Jean-Luc Mélenchon « pas mal, surtout depuis qu’il crie beaucoup moins sur les plateaux télé » . Des jeunes, des plus vieux, des familles. Anciens socialistes, communistes, révolutionnaires (par les urnes) ou simplement à gauche du PS… Tous ensemble pour dénoncer les ravages du néolibéralisme européen, le capitalisme fou, et la politique de Sarkozy.

A la tribune aussi, on veut montrer que l’union fait la force. Après Lucien Jallamion (République & socialisme), Danielle Obono, de Convergences et Alternative, un courant « unitaire » qui a quitté le NPA après son congrès de février, veut « construire une campagne large, unitaire, populaire » . Même discours rassembleur de Clémentine Autain, de la Fase, qui demande aux « déçus » du NPA de « venir avec nous » pour éviter que ne se reproduise le « scénario déprimant entre une droite dure et une gauche toujours plus molle » . Christian Picquet, ancien de la LCR et du NPA, aujourd’hui porte-parole de la Gauche Unitaire, galvanise la foule : il appelle à la mise en place d’un « nouveau Front populaire du XXIè siècle » et à « renverser la noblesse d’argent » . Vient ensuite l’ancienne des Verts devenue co-présidente du Parti de Gauche, Martine Billard, qui rappelle que l’écologie est une « remise en cause fondamentale du système » et non « un capitalisme repeint en vert » . A bon entendeur…

Mais la part belle est donnée au PC, sans lequel Jean-Luc Mélenchon n’aurait jamais été désigné candidat du Front de gauche. Dans un discours dédié à l’Europe, Pierre Laurent, secrétaire national du PC, « voi [t] un espoir qui se lève » : « Ce soir , clame-t-il, nous entrons en campagne pour infliger à Nicolas Sarkozy une défaite à la mesure des souffrances et du mépris qu’il a infligé à notre peuple » . Celui qui considère que « le règne de Nicolas Sarkozy est un accident de l’histoire » veut une « union solide » dans un « élargissement » du Front de gauche…

Last but not least, c’est à Jean-Luc Mélenchon, candidat depuis le 19 juin, de conclure le rassemblement par un discours fleuve (près de trois quart d’heure, voir ci-dessous), à la fois grave et galvaniseur, qu’il dédie « à nos frères et soeurs grecs » qui subissent un deuxième plan d’austérité, ainsi qu’au juge ayant demandé la relaxe du syndicaliste des « Conti », Xavier Mathieu.

« Il est fini le temps de l’éparpillement et de l’impuissance. Enfin, nous sommes réunis ! » , commence-t-il. Et de décliner les grands axes du programme : la titularisation de tous les fonctionnaires, la mise en place d’un salaire maximum, pas plus de 20 fois supérieur au plus petit salaire « et peut-être moins si les syndicalistes le veulent ! » , le partage des richesses, la planification écologique, le retrait de l’Otan, de l’Afghanistan, de la Libye… Un discours aux accents « jaurésiens » où il appelle la France à redevenir « terre de résistance » . Après l’Internationale, chantée de bon cœur le poing levé, on enchaîne sur une Marseillaise un rien grandiloquente. Le meeting est fini. La sono envoie le succès des HK & Les Saltimbanks, «On lâche rien», la foule danse. La campagne est lancée…
Discours de Jean-Luc Mélenchon par LCP

Politique
Temps de lecture : 5 minutes
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