Pas de vacances pour la résistance à Base élèves

Christine Tréguier  • 7 juillet 2011 abonné·es

Si on en croit l’Éducation nationale, la contestation autour du fichier Base élèves est une affaire classée, et les directeurs qui refusent encore de renseigner le fichier du premier degré sont des fonctionnaires indisciplinés qui méritent sanction. Selon le Collectif national de résistance à Base élèves (CNRBE), les pressions s’intensifient sur les récalcitrants, victimes de « harcèlement téléphonique, y compris pendant les congés scolaires, courriers électroniques comminatoires, convocations individuelles à l’inspection académique, chantage à la non-inscription au collège des élèves de CM2 qui ne seraient pas dans le fichier, menaces de retraits de salaire, menaces de retrait de la fonction de directeur   ». 
À Bauzy (Loir-et-Cher), l’enseignant responsable de la classe unique vient même de se voir notifier par l’inspection d’académie le retrait d’une fonction de directeur qu’il n’a pas. Dans une lettre de soutien envoyée au ministère, le CNRBE rappelle que tous ne font qu’appliquer les recommandations du Comité des droits de l’enfant de l’ONU. Celui-ci préconise en effet que « seules des données anonymes soient entrées dans des bases de données et que l’utilisation des données collectées soit régulée par la loi, de manière à en prévenir un usage abusif   ».



 Le ministère continue également de faire la sourde oreille aux demandes des parents souhaitant exercer leur droit d’opposition, et omet volontiers de le leur notifier en début d’année. Ce droit leur a pourtant été reconnu par le Conseil constitutionnel dans un arrêt du 19 juillet 2010. Mais le refus d’inscription des enfants doit se fonder sur « des motifs légitimes », et tous ceux qui ont été évoqués jusqu’ici ont été récusés. Le CNRBE a donc décidé de multiplier les recours de parents devant les tribunaux administratifs de province afin de découvrir quels sont les motifs recevables. Les procédures contestant la légalité du fichier n’ont pas davantage abouti. L’an dernier, 2 100 plaintes contre X ont été déposées, mais le procureur de Paris a décidé de les classer sans suite. Quatorze parents viennent donc de réitérer, en s’adressant directement à la doyenne des juges de Paris pour obtenir la saisie d’un juge d’instruction. S’ils obtiennent gain de cause, les 2 100 plaintes classées pourront être réactivées et jointes à la procédure. En parallèle, 428 lettres de parents ont été transmises au rectorat de Paris.



Le CNRBE semble également avoir été entendu par les politiques. Fin mai, c’est l’Assemblée de Corse qui ouvre le bal, en votant à l’unanimité une motion. Elle demande, entre autres, de renoncer à l’immatriculation des enfants (BNIE/RNIE), «   une remise à plat de tout le système informatique de l’Éducation nationale » et l’organisation d’ « un vrai débat sur l’utilisation des technologies numériques dans le service public d’éducation ». 
Le 20 juin, le Conseil de Paris adopte un vœu présenté par les élus d’Europe Écologie-Les Verts, appelant tous les utilisateurs à «   prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que la collecte, le stockage et l’utilisation de données personnelles sensibles restent confidentiels ». Et, le 29 juin, le conseil régional Provence-Alpes-Côte-d’Azur fait de même. Qui a dit que Base élèves était une « histoire dépassée »  ?

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