L’Europe a besoin d’eux

La France accueille moins de migrants que ses voisins européens. Pourtant, cette main d’œuvre étrangère est nécessaire.

Elodie Corvée  • 24 mai 2012 abonné·es

Pendant de nombreuses années, la France était, après l’Allemagne, le deuxième pays de l’Union européenne à avoir le plus d’étrangers vivant sur son sol. Depuis 2008, avec ses 3,6 millions d’étrangers (dont 3,1 millions environ vivant en métropole), elle est à la cinquième place, toujours derrière l’Allemagne (6,7 millions), mais dépassée par l’Espagne (5,5 millions), le Royaume-Uni (4,3 millions) et l’Italie (4,2 millions). Toutefois, elle reste le deuxième pays en nombre de demandes d’asile parmi les signataires de la Convention de Genève.

Selon le ministère de l’Intérieur, en 2009, 131 171 étrangers sont entrés légalement en France (nombre de titres de séjour délivrés, hors étudiants et saisonniers), soit un taux d’immigrants permanents entrés sur le territoire de 0,3 % par rapport à l’ensemble de la population du pays, plaçant la France à l’une des dernières place des pays de l’OCDE (taux moyen : 0,61 %). Loin derrière l’Italie (0,61 %), le Royaume-Uni (0,66 %), l’Espagne (0,75 %, la Suisse (1,51 %). Ce chiffre des étrangers entrant en France est nettement inférieur à ceux des autres grands pays européens d’immigration : la même année, l’Allemagne accueillait 606 300 étrangers, l’Espagne 469 300, le Royaume-Uni 471 000.

« En France, on n’est ni dans une période d’invasion ni dans une période de reflux, comme dans certains pays européens qui enregistrent moins d’entrées à cause de la crise économique de 2008 », analyse Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche au CNRS. Le Royaume-Uni, ­l’Irlande et ­l’Espagne accusent un solde migratoire négatif, les sortants étant plus nombreux que les entrants. Sans oublier les binationaux qui rentrent au pays.
Selon la chercheuse, une politique répressive en matière d’immigration, comme en France, n’est pas justifiée, pour deux raisons majeures : le relatif vieillissement de sa population et la pénurie de main-d’œuvre dans certains secteurs importants de l’économie. C’est pourquoi l’Allemagne ou le Royaume-Uni ont compris qu’il ne fallait pas fermer l’immigration du travail. Certains pays ne pourraient imaginer l’avenir sans immigration, comme la Suisse, qui compte près de 30 % d’étrangers parmi sa population.

Pourtant, en 2008, sous l’impulsion du ministre de l’Immigration Brice Hortefeux, un pacte de l’Union européenne reprenait en partie le concept d’immigration dite « choisie ». Selon, Catherine Wihtol de Wenden, « la politique européenne est de plus en plus sous la pression du populisme. On est en train de souverainiser des politiques de flux et d’européaniser des politiques d’intégration, alors que, dans le dispositif européen, on avait prévu d’européaniser les politiques d’entrée et de laisser à l’échelon national et local les politiques d’intégration ».

Publié dans le dossier
L'immigration loin des idées reçues
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