La nouvelle PAC adoptée oublie le bio et la petite agriculture familiale

Les 55 milliards d’euros distribués par la Politique agricole commune bénéficient essentiellement à 15 % des agriculteurs.

Claude-Marie Vadrot  • 24 janvier 2013
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La nouvelle PAC adoptée oublie le bio et la petite agriculture familiale
© Photo : AFP / ERIC GUILLORET / BIOSPHOTO

Mercredi 23 janvier, la Commission de l’agriculture du Parlement européen a adopté les textes qui devraient régir la nouvelle PAC (Politique Agricole Commune) pour les sept années à venir. Les parlementaires ont examiné 7400 amendements provenant essentiellement des Verts et des partis conservateurs. Les premiers souhaitaient modifier profondément un système qui pénalise la petite agriculture et l’agriculture biologique tandis que les seconds veulent prolonger la politique actuelle qui distribuent 80 % des aides à 15 % des agriculteurs européens.

Les fonds européens sont essentiellement perçues en France par les céréaliers, les élevages hors-sol et les grandes exploitations intensives dont le « revenu » peut être parfois alimenté à hauteur de 50 % par une aide européenne.

Après des mois de discussions les conservateurs et les socialistes ont voté en faveur de cette nouvelle PAC. Elle doit être encore approuvée en séance plénière du Parlement européen à Strasbourg au mois de mars. Après avoir été éventuellement modifiée par la Commission de Bruxelles, elle devra être ratifiée par le Conseil des ministres européens qui se prononcera définitivement au mois de juin. Commentaire des socialistes européens: « Ce n’est probablement pas une réforme parfaite mais sans doute la meilleure possible dans une Europe encore largement dominée par des forces conservatrices. »

Aucune aide supplémentaire pour l’agriculture bio ou de proximité

C’est le moins que l’on puisse dire puisque les parlementaires écologistes, minoritaires, n’ont pas réussi à obtenir une modification substantielle du système « qui ne fait qu’entériner, dit José Bové, vice-président de la Commission agricole, « le maintien des avantages acquis » . La proposition de développer la rotation des cultures pour réduire le recours aux pesticides et aux engrais de synthèse et donc limiter la rotation des cultures, a été écartée. Les agriculteurs bio et ceux qui veulent se reconvertir ne bénéficieront d’aucune aide supplémentaire qui pourrait faciliter le développement d’une agriculture de proximité, notamment près des grandes villes.

Les Verts avaient également proposé qu’une grande exploitation ne puisse pas bénéficier d’une aide annuelle de plus de 100 000 euros mais la majorité a décidé de fixer ce maximum à 300 000 euros. Or, explique José Bové, « une telle réduction aurait entraîné une économie annuelle de 7 milliards d’euros qui aurait pu servir à aider, en France et ailleurs, la petite agriculture familiale ». Tout comme elle aurait contribué à enfin inciter à une réduction de la pollution des terres et des nappes souterraines avec la diminution de l’épandage des lisiers nitratés et des pesticides promise par le Grenelle de l’Environnement.

Au demeurant, cette nouvelle PAC reste parfaitement virtuelle puisque les 27 pays de l’Europe ne se sont pas encore parvenus à se mettre d’accord sur le budget européen pour la période 2014-2020. Ils devraient faire une nouvelle tentative lors du sommet des 7 et 8 février prochain, de nombreux pays insistant pour réduire le montant de la Politique agricole commune qui représente 40 % de ce budget…

Écologie
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