Un petit pas vers la transition

Après six mois de péripéties, la loi sur la tarification progressive de l’électricité et du gaz est adoptée. Et déjà attaquée.

Patrick Piro  • 21 mars 2013 abonné·es

François Brottes tient « sa » loi ! C’est à l’automne que le député PS de l’Isère avait soumis au feu parlementaire sa proposition de tarification progressive de l’énergie, avec la bénédiction du gouvernement. Il a fallu attendre la semaine dernière pour la voir adoptée, après deux moutures et deux rejets par le Sénat [^2]. Une petite révolution dans une philosophie nationale : la fameuse péréquation, qui rend le prix du kilowattheure (kWh) indépendant de la localisation du client, fera place, dès 2015, à une grille progressive, destinée à induire des réductions de consommation. Les écologistes saluent ce premier pas vers la transition énergétique, tout en soulignant la modestie du mécanisme. Certes le bonus accordé à ceux qui ne consommeront pas au-delà d’un volume de base (considéré couvrir des besoins « normaux », différencié selon les énergies et qui sera défini par décret) atteindra 30 euros en 2017 pour 1 000 kWh (qui coûtent environ 120 euros pour un particulier), mais le malus, jusqu’à trois volumes de base consommés, culminera à 9 euros. Le Front de gauche, quant à lui, a voté contre la loi, redoutant que les plus modestes en pâtissent (les logements mal isolés sont plus énergivores) et regrettant qu’elle évacue le débat d’une réforme globale du système énergétique.

Le texte s’attaque cependant à bien d’autres points : le démantèlement de règles entravant le développement de l’éolien, l’extension des tarifs sociaux de l’énergie, pouvant bénéficier à quatre millions de personnes démunies (deux fois plus qu’aujourd’hui, en théorie), la généralisation des compteurs d’énergie individuels dans les immeubles (pour induire des économies), l’expérimentation également de tarifs sociaux et progressifs pour l’eau, ainsi que l’ouverture d’un marché permettant à des entreprises de se rémunérer sur les réductions de consommation d’énergie qu’elles auront suscitées.

L’avenir de ce texte ambitieux et hétéroclite reste cependant incertain. La droite a saisi le Conseil constitutionnel pour « manquement au principe d’égalité », arguant du fait que le calcul des volumes de base risque de pénaliser certaines catégories. D’autres écueils menacent : outre de possibles frictions avec l’actuel débat national sur la transition énergétique, les décrets d’application pourront facilement en atténuer sa portée. Sans parler des difficultés techniques propres à la tarification progressive : ses détracteurs jugent qu’elles feront tomber la loi toute seule.

[^2]: Voir Politis n° 1226.

Écologie
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